Festival Interceltique de Lorient 2017 – Année de l’Écosse

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Festival Interceltique de Lorient 2017

Année de l’Écosse

 

Après avoir célébré l’Australie et la Nouvelle Zélande en 2016, le Festival Interceltique de Lorient était cette année de retour en Europe afin de mettre à l’honneur, dix ans après, une des nations piliers de l’interceltisme depuis ses débuts, l’Écosse.

Le FIL est un événement urbain dispersé dans plusieurs lieux du centre-ville. Les contraintes imposées par l’état d’urgence et les craintes légitimes d’un attentat ont rendu obligatoire la sécurisation du site. Un important dispositif a donc été mis en place. Le Directeur du FIL, Lisardo LOMBARDIA, a néanmoins regretté, à juste titre, que les remarques se soient davantage focalisées, les jours précédant le début de la manifestation, sur cet aspect des choses plutôt que sur la programmation artistique.

On aurait dès lors pu craindre une baisse de la fréquentation, mais cela n’a pas été le cas, bien au contraire. Les premières estimations ont révélé qu’environ 750 000 festivaliers avaient fréquenté la cité morbihannaise.

Le Festival a de plus bénéficié d’une météo idéale, ni trop estivale, ni exécrable non plus, incitant les personnes à rester plus facilement et plus durablement dans le centre-ville de Lorient.

Une polémique a éclos au début de la manifestation en mettant en avant sa durée et son coût. Le Président et le Directeur Général ont tenu à rappeler que le FIL n’était pas un problème mais un atout pour la ville de Lorient.

Les motifs de satisfaction ne manquent d’ailleurs pas.

La vente du badge de soutien a connu une forte hausse pour atteindre les 68 000 unités.

Des spectacles se sont déroulé à guichet fermé : la Cotriade au Port de pêche, la soirée d’ouverture, la Grande Nuit de l’Écosse ainsi que les Grandes Soirées de la Cornemuse et de la Harpe. Les concerts de TRI YANN, d’Amy MCDONALD et des MUSICIENS DE SAINT JULIEN ont également bien fonctionné. La Grande Parade des Nations Celtes a, quant à elle, conquis 70 000 spectateurs dont plus de 10 000 au Stade du Moustoir.

Le Championnat des Bagadou a livré son verdict. Arrivé en tête lors de la première manche du championnat l’hiver dernier, le BAGAD CAP CAVAL de Plomeur a terminé deuxième à Lorient derrière le BAGAD KEMPER mais a remporté malgré tout le concours et a ainsi obtenu le titre pour la troisième année consécutive. Les bagadou de Saint Nazaire et d’Elven descendent en deuxième catégorie et croiseront leurs homologues de Plougastel-Daoulas et de Cesson-Sevigné qui évolueront tous deux dans l’élite des bagadou la saison prochaine.

En 2018, Le Festival Interceltique restera dans la partie britannique des pays celtes en accueillant le Pays de Galles.

« Le droit à la culture, c’est purement et simplement la volonté d’y accéder » disait André MALRAUX. En faisant face aux contraintes, qu’elles soient économiques ou sécuritaires, le Festival Interceltique a montré qu’il avait la volonté de s’adapter tout en continuant à développer ce qui fait son essence depuis 1971.

COMPTE-RENDU

BAGAD ISTANBUL

Contrairement à ce que peut laisser entendre le nom de la formation, il ne s’agit pas d’un bagad provenant de la plus grande ville de Turquie. Cela aurait pu être le cas puisque des Celtes, les Galates, ont essaimé jusqu’en Anatolie entre le troisième siècle avant J.C. et le sixième siècle de notre ère.

Le BAGAD ISTANBUL est le fruit de la rencontre entre un bagad breton, le BAGAD PENHARS de Quimper et le KOLEKTIF ISTANBUL, un ensemble stambouliote (zurna*, sousaphone**, chant/trompette, saxophone, accordéon, clarinette, percussions) qui s’efforce de faire connaître le répertoire turco-balkanique. Loin de sembler discordante et incongrue, cette aventure musicale a enthousiasmé le public et a permis au BAGAD ISTANBUL de remporter le prix musical Produit en Bretagne dans la catégorie « Artiste Découverte ».

Les musiciens ont inauguré le Quai de la Bretagne le premier jour du FIL. Devant un parterre attentif et curieux tout autant que surpris, les deux ensembles ont mélangé leur répertoire. Ils ont prouvé que les rencontres entre musique bretonne et chant turc, entre musique des Balkans et cornemuses et bombardes n’avaient rien d’incompatibles et de dissonantes.

* hautbois turc – ** instrument apparenté au tuba

Entretien avec Laurent MAREC (Penn sonneur du BAGAD PENHARS)
Comment avez-vous rencontré le KOLEKTIF ISTANBUL ?

Nous avons rencontré le KOLEKTIF par le biais de Patrig SICARD. Richard LANIEPCE, lorientais et fondateur du groupe, souhaitait partager la scène avec un bagad. Il connaît Patrig depuis plus de vingt ans. Patrig nous a mis en contact en 2011. Les premiers échanges se sont faits par mails, puis par téléphone. L’envie de travailler ensemble a vite pris des deux côtés !!

Comment avez-vous constitué un répertoire en commun ? Cela a-t-il été facile ?

Richard et Asli, sa compagne et chanteuse du KOLEKTIF, sont venus à Quimper. Nous avons partagé nos répertoires et passé des heures à trier pour choisir douze ou treize morceaux. Des deux côtés il y a eu des envies de jouer certains morceaux en particulier. Par exemple, le KOLEKTIF souhaitait vraiment jouer notre kas a barh et une de nos marches. De notre côté, Dramnin incidé et Karadeniz nous ont tapé dans l’oreille.

Comment avez-vous travaillé ensuite ce répertoire compte tenu de la distance géographique ?

Chaque groupe a travaillé de son côté puis nous avons eu deux périodes de travail en commun. Le KOLEKTIF est venu en 2012 sur Quimper où nous avons donc mis en place une première partie, les cinq ou six morceaux les plus « simples » à caler. Puis le Bagad s’est rendu à Istanbul en 2013. Là nous avons pu mettre en place la totalité du concert.

Vous êtes-vous produits en Turquie ?

Oui deux fois, en 2013 et 2015, deux déplacements qui restent dans nos mémoires. Lors du premier, nous sommes arrivés en plein milieu du « printemps turque », un mouvement populaire qui défend le parc Gézi contre un projet immobilier. Nous nous sommes retrouvés pris dans une ferveur et nous avons défilé avec les manifestants. Nous avons vécu ce jour-là un moment extrêmement fort ! Les concerts prévus lors de ce premier voyage ont finalement été annulés. Nous nous sommes produits deux fois malgré tout, l’une au lycée français et l’autre au Palais de France sur l’invitation de l’ambassadeur.

En 2015, nous nous y sommes rendus pour deux concerts qui ont rencontré un large succès. Nous avons tous profité de la beauté d’Istanbul et de la gentillesse des Stambouliotes.

Le public breton est peut-être plus habitué à entendre de la musique des Balkans que le public turc de la musique bretonne. Les réactions sont-elles bonnes ? Le public turc apprécie-t-il ?

Nous avons des rythmes en commun, par exemple une de leurs danses est pratiquement l’inverse (sens de la danse) d’une autre bien de chez nous, l’an-dro. Le public turc nous a porté et suivi en tapant des mains.

Les deux ensembles ont une vie chacun de leur côté. Le BAGAD ISTANBUL est-il une rencontre ponctuelle où bien le projet va-t-il perdurer et, pourquoi pas, évoluer ?

Aujourd’hui, nous sommes sur les démarches pour la saison 2018. Nous ne fixons pas de limites au projet mais nous ne le laisserons pas continuer sans le remettre à jour et lui donner de la fraîcheur !

Cette rencontre peut-elle influencer le BAGAD PENHARS que ce soit du point de vue des mélodies que du point de vue technique ?

D’un point de vue mélodique peut-être, mais nous avons toujours eu un intérêt pour les musiques du monde. Nous avons joué un air Kabyle entre 2005 et 2010. Nous avons repris également quelques morceaux des PIRES dans des ensembles de bombardes. BAGAD ISTANBUL n’est pas notre premier pas vers d’autres musiques. Les bretons sont voyageurs et curieux, ceci explique peut-être cela !

Connaissiez-vous la musique des Balkans et d’Anatolie et de son côté le KOLEKTIF, hormis Richard, connaissait-il la musique bretonne ou même savait-il ce qu’était un bagad ?

La musique des Balkans est très écoutée dans le « milieu Bagad », ses rythmes et mélodies sont naturellement appréciés par nos musiciens. Il y a souvent un coté virtuose qui entraîne aisément les gens. C’est une musique qu’on aime découvrir un peu plus chaque jour.

Le KOLEKTIF a lui découvert ce qu’est un Bagad. Les musiciens ont été surpris de se retrouver devant un orchestre aussi puissant. Ils se sont vite laisser prendre par la puissance du groupe et aujourd’hui ils aiment rejouer et partager la scène avec nous et cela se voit, je pense.

Il y a eu des Celtes en Turquie, les Galates. Y avez-vous pensé ? Avez-vous évoqué le sujet et parfois joué sur cette réalité historique ?

Non pas vraiment. Notre échange reste essentiellement musical. Nous échangeons souvent sur les différents modes de vie d’hier et d’aujourd’hui mais malheureusement plus souvent d’aujourd’hui vu la situation actuelle en Turquie.

CD : Bagad Istanbul

Site : http://www.bagadistanbul.com/

THE CELTIC SOCIAL CLUB

THE CELTIC SOCIAL CLUB (CSC) a déjà eu les honneurs du FIL en 2015. Le groupe avait eu cette année-là la lourde tâche de se produire en première partie des écossais de SIMPLE MINDS.

Alors qu’il ne devait s’agir au départ pour les musiciens que d’une simple récréation qui n’était pas prévue pour durer, l’aventure s’est finalement poursuivie. Depuis deux ans, la physionomie du CSC a cependant connu un changement notoire avec le départ du chanteur de RED CARDELL, Jean-Pierre RIOU, et l’arrivé de Goulven HAMEL (mandoline, banjo, guitares acoustique et électrique). L’un des initiateurs du projet, Manu MASKO (batterie), a lui quitté RED CARDELL pour se consacrer au CSC. Le reste de la formation est par contre restée inchangée. Mathieu PEQUERIAU (planche à laver, harmonica), Ronan LE BARS (cornemuse irlandaise, flûtes), Pierre STEPHAN (violon), Richard PUAUD (basse) et Jimme O’NEILL (guitares), qui de fait devient le seul chanteur, sont toujours présents.

La prestation a donné lieu à une combinaison entre des titres du nouvel album paru au printemps 2017 (A new kind of freedom, When you need someone ou l’instrumental A dub for Black Donald) et des précédents morceaux (Celtic social club qui est en quelque sorte l’hymne du groupe, sa carte de visite). Ces derniers étaient parfois retravaillés, nouvelle formation oblige. Ainsi Kroas Hent bénéficiait de paroles en anglais. L’une des particularités du CSC est de partir de thèmes traditionnels pour arriver progressivement à créer de nouvelles chansons.

Malgré l’heure tardive, les musiciens communiaient avec les spectateurs dans une ambiance surchauffée et enthousiaste.

THE CELTIC SOCIAL CLUB bénéficie d’une juste reconnaissance critique et publique, preuve s’il en est que le groupe a eu raison de se structurer.

CD : A new kind of freedom

Site : http://www.celticsocialclub.com/

HEVIA

HEVIA est un habitué du FIL. Il en est même à sa troisième participation depuis 2011 et à chaque fois pour un projet différent. Si en 2013, alors que son pays était à l’honneur, il avait livré un concert sobre et intimiste, en 2011, il avait rendu hommage à son compatriote et modèle, le sonneur Jose REMIS OVALLE qui avait entrepris dans les années 50 une tournée sur le continent américain (Argentine, Mexique, Cuba, USA).

Entre 1850 et 1950, on estime à environ un million le nombre d’asturiens partis s’installer en Amérique latine, emportant leur culture et leurs instruments avec eux.

Le nouveau projet d’HEVIA, Al Son del Indianu, se situe dans la continuité de son illustre prédécesseur, sur les traces de la cornemuse asturienne aux Caraïbes. Le sonneur a travaillé avec des musiciens de Saint Domingue et de la Havane pour créer ce métissage.

Le concert de Lorient était une première mondiale. Contrairement à ses prestations habituelles, HEVIA avait laissé de côté le tout électronique et était accompagné par une formation plus classique (basse, batterie, percussions, claviers). Une section de cuivres (saxophone, trompette, trombone) apportaient un swing qui, conjugué au son de la gaïta, surprenait et envoûtait.

HEVIA et ses musiciens alternaient les compositions ainsi que des airs très connus non issus du répertoire celtique. Le public a ainsi pu apprécier Guantanamera qui est une des mélodies cubaine les plus renommée, qui serait d’ailleurs d’origine asturienne, ou encore le célèbre tango de Carlos GARDEL.

Albo était certes joué sur une gaïta électronique mais avec une orchestration complètement renouvelée et affranchie des sonorités technos de la version originale. Busindre reel, sans doute le titre le plus marquant du répertoire d’HEVIA, bénéficiait également d’une réinterprétation qui le rendait métamorphosé.

Mais le moment le plus émouvant du concert fut, une fois de plus, l’inoubliable air Asturias, du compositeur espagnol Isaac ALBENIZ. D’abord proposé sous le titre Asturias, cha cha cha par l’ensemble des protagonistes, il a été repris durant les rappels dans une version plus sobre et solennelle pour laquelle HEVIA était seulement accompagné de sa sœur dans un duo gaïta et percussions.

Il ne reste plus qu’à espérer que ce nouveau projet très réussi trouve son prolongement sur CD, le dernier album d’HEVIA remontant à plus de dix ans.

Site : http://www.hevia.es/

TRI YANN

En 2016, le plus célèbre des groupes bretons célébrait ses quarante-cinq ans d’existence en faisant paraître un nouvel album, le superbe La belle enchantée, et en démarrant quelques mois plus tard une tournée anniversaire. Il paraissait dès lors logique que cette tournée fasse une halte à Lorient.

On se souvient que le spectacle des quarante ans du groupe en 2011 s’était déroulé en extérieur au Slipway, sous des trombes d’eau. Cette fois-ci, c’est sous le chapiteau de l’Espace Marine que le public était convié à venir souffler les bougies avec le groupe nantais.

Le spectacle s’intitulait « La grande veillée de la belle enchantée ». Afin de donner plus de crédit et d’ampleur à cette notion de veillée, le groupe a demandé à ce que des spectateurs montent sur la scène et s’installent de chaque côté.

Vêtus comme à l’accoutumée de costumes originaux, Les TRI YANN ont ensuite déroulé leur riche répertoire entre musique traditionnelle, folk et rock, mâtinés de touches électros.

Les titres du dernier album étaient bien sur mis en avant (Far away from sky, La bonne fam au courti, Le bal des morts-vivants, La bayadère et le roi). Les classiques qu’ils soient récents ou plus anciens n’ont pas été oubliés (Les prisons de Nantes, Pelot d’Hennebont, Divent an dour, Je m’en va), de même que la fameuse et alléchante recette des crêpes, Por faire de bonnes crespes.

Évidemment, comme à son habitude depuis quatre décennies, « La jument de Michao et son petit poulain a une nouvelle fois passé dans le pré et mangé tout le foin ».

Sant Efflam hag ar Roue Arzur, un cantique issu du Barzaz Breizh bénéficiait du renfort des chanteuses KOHANN et Clarisse LAVANANT. Le très beau La belle enchantée était appuyé par la présence du Bagad de Saint Nazaire.

Jean-Louis JOSSIC nous a également fait part de ses talents de conteur en nous narrant le séjour de Jésus en Bretagne durant l’été 2016.

Clarisse LAVANNANT et KOHANN ont pu profiter d’une mise en lumière de leur propre répertoire. La première a interprété J’avais cinq enfants, une chanson sur la réunification de la Bretagne, a cappella, une prestation risquée mais réussie. Dans un tout autre style, la seconde a fait découvrir aux spectateurs Lion, un titre électro plus déconcertant mais néanmoins intéressant.

Cependant, Le moment le plus intense du concert fut indéniablement l’interprétation, par le groupe et les chanteuses, de l’hymne breton, Bro gozh ma Zadou. Avant le spectacle, les paroles avaient été distribuées au public et ce dernier n’a pas manqué de les reprendre en choeur.

Depuis ses débuts, le groupe a subi maintes et maintes critiques. Il n’en demeure pas moins que TRI YANN est toujours présent et la prestation fut impeccable. On attend désormais avec impatience le concert des cinquante ans.

CD : La belle enchantée

Site : http://triyann1.wixsite.com/triyann

SCÈNE ÉCOSSAISE

Comme cela avait déjà été le cas en 2007, les artistes écossais ont littéralement pris possession de la ville de Lorient. Forte de 300 personnes, la délégation écossaise a dignement célébré le statut du pays honoré. L’offre musicale écossaise représentait 20 % de la programmation totale du Festival, proposant un choix riche entre artistes reconnus et confirmés et la nouvelle génération de musiciens et de chanteurs.

Derrière le nom énigmatique d’ELEPHANT SESSIONS se cache un combo de cinq musiciens (guitare, basse, batterie, violon, mandoline). Ces derniers n’avaient pas encore de nom lors de leur premier concert et c’est en entendant le mot « éléphant » dans une chanson d’un autre groupe programmé ce jour-là qu’ils ont opté pour cette appellation. Les musiciens ont grandi avec la culture de la musique traditionnelle et ont ensuite évolué en ajoutant un côté rock. Les morceaux essentiellement instrumentaux étaient très entraînants et chacun des membres s’exprimait. La guitare, la basse et la batterie asseyaient une rythmique aux accents syncopés tandis que le violon et surtout la mandoline, très présente, assuraient la mélodie. Les musiciens d’ELEPHANT SESSIONS ont enflammé le pavillon écossais devant un public littéralement envoûté. Consécration ultime, leur titre Ainya’s a été utilisé comme thème musical de la bande annonce de l’édition 2017 du FIL.

Dans un genre tout aussi piquant, TIDE LINES a, de la même manière, illuminé la scène du pavillon écossais. TIDE LINES est un quatuor (guitare acoustique, guitare électrique, claviers, batterie) formé en juin 2016 mais dont les membres ont déjà eu de précédentes expériences. Les influences musicales des Highlands et des Hébrides étaient solidement ancrées et reconnaissables dans les interprétations à la démarche élégante et ardente. L’un des guitaristes, Alasdair TURNER, délaissait parfois sa guitare pour une cornemuse mais le groupe jouait la plupart du temps sans instruments trads. Cette approche n’était pas sans rappeler les glorieux aînés du groupe RUNRIG, un sentiment d’autant plus renforcé par la manière de chanter de Robert ROBERTSON qui faisait parfois penser à celle de Rory MACDONALD.

Le terme écossais HÒ-RÒ désigne un son utilisé pour enseigner la cornemuse. Au départ les musiciens opéraient simplement en quatuor, mais deux nouveaux membres sont venus compléter l’effectif pour former le groupe qui s’est présenté devant le public lorientais (violon/chant, guitare, accordéon, cornemuse/bodhran, claviers, batterie).

HÒ-RÒ proposait une combinaison entre des mélodies traditionnelles et des compositions originales dans un style actuel tout en étant fortement enracinée. La large palette d’instruments permettait au groupe de varier les atmosphères.

Malgré sa jeunesse, la chanteuse Lucy DOOGAN excellait au puirt-a-beul, cette technique consistant à interpréter des paroles souvent sans signification particulière de manière très rythmée. Soutenu par une batterie incisive sans être lourde, l’ensemble était d’une redoutable efficacité.

TANNARA est un quatuor plus conventionnel (guitare, harpe, accordéon, violon) sans que cela ne soit péjoratif. Le groupe s’est constitué en 2015 et ses membres sont originaires des quatre coins de l’Ecosse. TANNARA proposait une musique folk composée de morceaux originaux ou traditionnels aux arrangements soignés. L’ouvrage était élégant et aérien avec parfois de belles ardeurs.

FARA est une formation atypique puisque entièrement féminine et composée de trois violonistes ainsi que d’une pianiste. Amies depuis longtemps, les quatre musiciennes et chanteuses affichaient une complicité flagrante dans l’interprétation de traditionnels ou de compositions aux arrangements dynamiques et harmonieux.

Plus traditionnel dans la forme mais moins dans le fond, le trio TALISK (violon, concertina, guitare) a lui aussi obtenu les faveurs du public grâce à d’excellents instrumentistes, en particulier l’accordéoniste Mohsen AMINI complètement déchaîné par moments

Bien qu’écossais, CALUM STEWART est un virtuose de la cornemuse irlandaise. Il est connu pour avoir évolué au sein du groupe MANRAN ou encore pour son duo avec le flûtiste breton Heikki BOURGAULT. Il était accompagné là par des pointures elles aussi renommées, Ronan PELLEN (cistre), Gilles LE BIGOT (guitare) et Yann LE BOZEC (contrebasse). On aurait pu craindre qu’avec de tels musiciens chevronnés, la technicité prenne le pas sur l’émotion. Il n’en fut rien. Les quatre comparses ont proposé une  session puissante et très mélodique. A l’instar du travail de Ronan LE BARS sur la musique bretonne, Calum STEWART a fait sonner son instrument sur de la musique écossaise d’une manière admirable.

ELEPHANT SESSIONS http://elephantsessions.com/ – CD : All we have is now

TIDE LINES http://www.tidelinesband.com/ – CD : Dreams we never lost

HÒ-RÒ https://www.musichoro.com/ – CD : Hò-Rò

TANNARA https://tannaramusic.com/ – CD : Trig

FARA http://faramusic.co.uk/ – CD : Cross the line

TALISK http://www.talisk.co.uk/ – CD : Abyss

CALUM STEWART https://www.calum-stewart.com/ – CD : Tales from the north

BEAT BOUET TRIO

BEAT BOUET TRIO est un groupe plutôt atypique dans l’univers de la musique bretonne. Originaire de Haute-Bretagne, FAYA GUR (chant), VANAO (accordéon) et T BURT (beat bouet) façonne un concept musical inclassable consistant à mélanger le hip-hop, le beat box et le trad de l’est de la Bretagne pour aboutir à ce que l’on pourrait appeler un fest-noz gallo.

Sur la scène du Quai de la Bretagne, le trio s’est fait l’ambassadeur du pays gallo et portait le message du vivre à la campagne dans une société démocratique et écologique. Il bénéficiait du renfort de Fabiola AUGUSTA, une chanteuse rencontrée lors d’une tournée en Belgique, qui est également présente sur le dernier album.

La musique était rythmée, frénétique et diablement dansante comme sur Naoned (maraîchine) ou Lafayette City (entre musique cajun et rap). Sans être moralisateur, les textes, que l’on pouvait aisément comprendre, appuyaient régulièrement là où ça peut faire mal (Génération Y, La monnaie avec ses petites piques à certains politiques), rendant l’ensemble hautement jubilatoire.

Réactualiser le gallo et l’utiliser en faisant des musiques actuelles permet de dire aux jeunes qu’il n’y a rien de ringard et que la langue peut s’adapter à la musique d’aujourd’hui.

CD : Soumission impossible

Site : http://beatbouettrio.wixsite.com/beatbouettrio

PLANTEC

Le groupe PLANTEC est un habitué de l’Interceltique. La formation a régulièrement changé depuis ses débuts, partant du traditionnel groupe de fest-noz fortement influencé par AR RE YAOUANK, évoluant progressivement vers un ensemble très rock au sein duquel le chant en breton prenait une place importante pour enfin aboutir à la formule actuelle.

Le groupe navigue dorénavant en trio. La colonne vertébrale reste les frères PLANTEC, Odran (bombarde) et Yannick (guitare) mais ils sont désormais renforcés par Djibril (platines) afin de proposer une musique fortement teintée de sonorités électros.

PLANTEC revenait cette année avec l’intention d’enregistrer la prestation dans le but de la graver ensuite sur CD et DVD.

Le son de la bombarde était bien mis en avant, soutenu par les rythmes électros, tandis que la guitare acoustique tempérait l’ensemble sans pour autant l’affadir. Si l’ambition du groupe était de faire danser, le visuel prenait également une place importante. Des éclairages bleutés ainsi que des projections sur des écrans situés derrière le groupe participaient à la mise en scène du spectacle. Aux frontières de la musique bretonne et des musiques tribales voire chamaniques, PLANTEC a su faire danser ou simplement pogoter le public jusqu’à le conduire aux limites de la transe.

CD : Kontakt

Site : https://www.plantec.fr

ANABEL SANTIAGO

Anabel SANTIAGO a représenté un des grands coups de cœur de l’édition 2017. La chanteuse s’est d’abord produite aux Après-midi du folk puis un soir sur le Quai de la Bretagne, touchant ainsi un public plus important et qui ne s’attendait pas à ce qu’il a pu découvrir. Tout en restant dans une base traditionnelle, Anabel a toujours œuvré vers des courants évolutifs. Cela lui a permis d’obtenir le prix de la meilleure chanteuse, accordé par le Ministère de l’éducation et la politique linguistique des Asturies.

Anabel SANTIAGO a déclaré d’emblée, en entrant en scène, qu’elle allait proposer une alliance entre la musique asturienne et la musique électronique. Accompagnée par quatre musiciens (claviers, programmations, percussions, guitare électrique), elle a, de sa voix puissante, livré un concert risqué et surprenant. L’habillage sonore était effectivement électro mais pas seulement, certains titres sonnant moins avant-gardiste. La chanteuse a donné une superbe version du traditionnel Santa barbara bandita, connue en Bretagne pour avoir été chanté par Gilles SERVAT. Elle a également convié deux personnes du public à venir danser sur scène à ses côtés. De nombreux asturiens se trouvaient dans la salle et ne se sont pas fait prier pour reprendre El Currucucu.

Goethe avait écrit : « L’audace a du génie, du pouvoir, de la magie ». Cette citation pourrait assurément qualifier la prestation d’Anabel SANTIAGO.

Entretien avec Anabel SANTIAGO
Comment as-tu débuté la musique ?

J’ai commencé toute petite à chanter. J’écoutais ma grand-mère interpréter les chants traditionnels asturiens. Je faisais la même chose et j’ai continué. A mesure que je grandissais, j’ai voulu devenir professionnelle et là c’était vraiment du pur chant traditionnel. J’ai gagné beaucoup de prix.

Mais tout cela avait déjà été fait finalement. Ça tournait en rond et j’ai voulu changer. C’est pour cela que j’ai fait une fusion avec la musique électronique. J’ai commencé par une collaboration avec DIXEBRA et c’était plutôt la partie rock. Déjà il y avait une innovation. Cela m’avait plu et c’est pourquoi j’ai voulu changer la tonalité traditionnelle pour être dans ce mélange électro et traditionnel.

Tu as une voix très puissante. C’est naturel ou tu as travaillé pour cela ?

J’ai cette voix depuis toute petite. C’est une chose dont j’ai hérité. J’avais déjà cette voix d’adulte mais je l’ai aussi travaillée. J’ai pris des cours en Asturies et aussi à Madrid. Actuellement, je suis professeur de chant. J’ai une double casquette car je conserve ma carrière de chanteuse.

Ton spectacle comporte des sonorités électroniques. Comment le public réagi-t-il ?

Cela fait quelques mois que j’ai changé radicalement de tonalités. On connaissait avant la Anabel sous l’angle de la tradition pure. J’ai démarré une tournée électro et j’ai fait deux concerts en Asturies, Lorient était le troisième. La première réaction est la surprise car c’est vraiment étonnant comparé à ce que je faisais avant. C’est un chemin intéressant à poursuivre.

Désormais, il n’y a plus d’instruments traditionnels ?

Pour les instruments, il y a le côté traditionnel avec toute la partie percussions de Manuel CORDERO. Il est vrai que je me permets cette fusion avec l’électro et c’est une partie intéressante que je veux vraiment enrichir pour ouvrir au maximum la musique asturienne à d’autres publics.

Les chansons sont toujours traditionnelles ou est-ce que tu en composes aussi ?

J’écris mes chansons en partant d’une base traditionnelle. Mais j’ai les deux aspects car je reprends aussi des chants traditionnels sous un autre angle, celui que je donne maintenant. J’aime partir là-dessus. Je suis jeune et je veux m’ouvrir à toutes possibilités et envisager cet angle électro.

De quoi parlent les textes de tes chansons ?

Le thème des chansons est les professions en Asturies. On avait le thème de la mine qui est très important. On avait aussi les professions des champs, les laboureurs, et tous les métiers de base pour aller vers la modernité.

La chanson Santa Barbara Bendita a aussi été interprétée par Gilles SERVAT. Le connais-tu ?

Il y a une chanson de Gilles SERVAT sur un de mes albums, L’asturianu ye mio patria. Je me suis approprié sa chanson, Ar brezhoneg eo ma bro (la langue bretonne est ma patrie) en disant que la langue asturienne est ma patrie.

Chanter en langue asturienne, c’est important pour toi ? C’est un acte militant ?

Je chante en asturien parce que les chants traditionnels sont en asturien. Cela l’a toujours été. C’est comme si on traduisait les chants bretons en français, ça n’aurait pas de sens. Là, ça évoque la vie des asturiens et c’est pour ça que je veux conserver cette idée de chanter en asturien.

On ressent parfois des influences allant de PINK FLOYD à SANTANA.

Dans le groupe, on a la partie traditionnelle avec Manuel CORDERO, mais on a aussi le guitariste, le claviériste et le programmateur qui viennent de groupes de rock. C’est pour cela qu’ils y a des nuances d’inspiration rock. C’est un ensemble d’idées pour former ces musiques.

Tu tournes beaucoup en Asturies et en dehors ?

Je fais évidemment beaucoup de tournées en Asturies, les chansons étant écrites en langue asturienne. Mais je fais aussi des tournées en Espagne : Madrid, Catalogne, Andalousie, Pays Basque, Leon. Comme je suis née en Argentine, à Buenos Aires, je donne des concerts dans les centres asturiens du monde entier. Vingt-quatre ans à travailler, forcement on est connue (rires) !

Un grand merci à Stéphanie, traductrice bénévole, pour sa disponibilité.

CD : Llances de Papel

Site : https://fr-fr.facebook.com/Anabel-Santiago-293586497375888/

LES MUSICIENS DE SAINT JULIEN

LES MUSICIENS DE SAINT JULIEN est un ensemble fondé en 2006 à la suite d’un concours de cornemuse remporté par l’initiateur du projet François LAZAREVITCH. Cet ensemble musical, qui tient son nom du patron des ménétriers, s’applique à faire connaître la musique ancienne et la musique baroque. Son large répertoire porte tout autant sur Johann Sebastian BACH ou Antonio VIVALDI (Les quatre saisons) que sur les musiques traditionnelles du cœur de la France (Auvergne, Centre France, Limousin) ou les musiques anciennes d’Irlande et d’Écosse.

Ils ont justement consacré tout un album à la musique écossaise du dix-huitième siècle, intitulé For ever fortune et c’est ce qui a légitimement servi de matière au concert de Lorient.

Loin des excès de décibels ou de la frénésie des différentes scènes du FIL, LES MUSICIENS DE SAINT JULIEN ont produit un spectacle de très haute tenue dans lequel les intervenants rivalisaient de virtuosité dans le maniement de leurs instruments (harpe, luth, violon, viole de gambe, flûtes, petite cornemuse) et dans l’interprétation des différentes pièces qui pour certaines résonnaient de manière familière à nos oreilles.

Le chant lyrique pouvait surprendre car il est assez inhabituel dans la musique traditionnelle, mais une fois passée l’étonnement, les craintes finissaient par s’estomper pour laisser place à l’émotion.

Le musicologue Joseph DE MARLIAVE avait écrit au sujet des derniers Quatuors de BEETHOVEN « qu’il s’agissait d’un art où l’on sent parfois plus de cérébralité que de tendresse et surtout que de sensualité ». LES MUSICIENS DE SAINT JULIEN ont su évité cet écueil et ont littéralement transporté leur auditoire.

CD : For ever fortune

Site : http://www.lesmusiciensdesaintjulien.fr/

DIXEBRA

La première apparition de DIXEBRA au Festival Interceltique remonte à 1997. Vingt ans plus tard et trois ans après son dernier passage, le groupe revenait à l’occasion de la tournée célébrant son trentième anniversaire.

En trois décennies, DIXEBRA est devenu une véritable institution en Asturies. Il fut surtout le premier groupe de rock en langue asturienne proposant une musique puissante et très rythmée avec des paroles engagées parlant de combats sociaux et de défense de la langue.

Xune ELIPE, le charismatique chanteur et meneur, est aujourd’hui le seul membre de la formation d’origine. A ses côtés officiait un solide ensemble comprenant deux guitares électriques, une basse, une batterie, une section de cuivres (trompette, trombone, saxophone) et par moments une gaïta et un accordéon. Des invités, et non des moindres, sont également intervenus, Xavier TEJEDOR (accordéon), José Manuel TEJEDOR (gaïta), Ruben BARA (violon) et même le bagad SONERIEN AN ORIANT.

Absolument survolté sur scène, bondissant d’un bout à l’autre, Xune ne se ménageait pas alors que les titres s’enchaînaient. Le répertoire proposé privilégiait les airs enlevés. Le groupe se produisant en Bretagne et non en Asturies, il offrait davantage de sonorités folks sans toutefois rien enlever à la frénésie rock qui le caractérise. A l’issue de La danza, un des titres les plus relevés et une chanson sur la langue asturienne, le point levé, Xune a même scandé « Brezhoneg, Yezh ofisiel » (breton, langue officielle). Esto ye Asturies a bénéficié d’abord d’une intro à la guitare électrique que n’aurait certainement pas reniée Jimi HENDRIX et ensuite d’un final époustouflant.

Le concert n’a hélas pas connu une large affluence et l’Espace Marine sonnait terriblement creux. DIXEBRA demeure encore inconnu pour les non-initiés et il est bien dommage qu’un tel groupe ne puisse bénéficier d’une plus grande médiatisation en dehors du Festival.

CD : Tempios modernos

Site : https://fr-fr.facebook.com/dixebraoficial/

LUAR NA LUBRE

LUAR NA LUBRE célèbre depuis l’année dernière ses trente ans d’existence. Après trois décennies, le groupe est devenu une institution et demeure, avec MILLADOIRO, un des meilleurs ambassadeurs de la musique traditionnelle galicienne. Un de leurs titres, O son do ar a d’ailleurs été repris par Mike OLDFIELD en 1996 sur son album Voyager, sous le titre Song of the sun, offrant ainsi à LUAR NA LUBRE, pour ses dix ans, une reconnaissance internationale.

Si le groupe est d’être resté stable du point de vue des instrumentistes, les chanteuses ont par contre régulièrement changé. Pour sa cinquième participation au FIL, il était accompagné de sa nouvelle recrue Belém TAJES. Cette dernière possède une voix agréable et puissante assurant ainsi une continuité avec les interprètes qui l’ont précédée. De plus, elle joue également de la gaïta.

LUAR NA LUBRE se produisait en première partie des irlandais d’ALTAN et on ne pouvait s’empêcher de discerner une parenté artistique évidente entre les deux formations.

Le groupe alternait les titres chantés et les passages purement instrumentaux dans une harmonie impeccable. Les musiciens n’étaient pas présents tout le temps ensemble sur scène. Cela permettait de façonner différentes combinaisons instrumentales entre flûte, gaïta, guitare, violon, percussions et bodhran. L’interprétation de Memoria de noite a fait partie de ces moments mémorables et de toute beauté.

En fin de concert, LUAR NA LUBRE a livré, sous le titre Os animaïs, une flamboyante version du classique Johnny I hardly knew ya, qu’on peut entendre entre autres dans le film de Stanley KUBRICK Docteur Folamour.

LUAR NA LUBRE a remarquablement réussi à faire découvrir toute la profondeur de sa musique folk aux spectateurs.

CD : XXX Aniversario

Site : http://www.luarnalubre.com/

ALTAN

On n’avait pas eu l’opportunité de voir ALTAN à Lorient depuis bien longtemps. Le célèbre groupe irlandais effectuait lui aussi une tournée marquant ses trente années d’existence.

ALTAN a été formé par Mairéad NÍ MHAONAIGH (chant, violon) et son mari, Frankie KENNEDY (flûte). Malgré le décès de ce dernier en 1994, le groupe a poursuivi son aventure et il connaît depuis un succès international. Mairéad était ce soir-là entouré de quatre autres musiciens (guitare, accordéon, bouzouki et bodhran).

Le répertoire d’ALTAN emprunte principalement dans le riche héritage de sa région d’origine, le Donegal. Les musiciens faisaient preuve d’une vélocité indubitable dans l’interprétation de titres instrumentaux tels que des suites de reels et de jigs.

À côté de ces titres de danses, ALTAN proposait de la même manière des ballades chantées, en gaélique et en anglais, donnant ainsi la possibilité de savourer la voix de Mairéad.

Le guitariste, Mark Kelly, faisait des efforts pour communiquer en français avec le public et expliquer le sens des paroles, non sans humour, comme une chanson d’amour dans laquelle « un jeune homme demande la main d’une jeune fille, le père dit non car le jeune homme aurait dû demander la fille toute entière ».

Le tourneur du groupe en France, Naiade Productions, a soumis l’idée de célébrer cet anniversaire en proposant une rencontre entre le groupe irlandais et des musiciens bretons. C’est ainsi que Ronan LE BARS (cornemuse irlandaise), Sylvain BAROU (flûtes) et Lina BELLARD (chant, harpe) se sont retrouvés conviés à cette aventure. Devant un parterre conquis, les huit musiciens ont alors alterné pour une connexion entre musique irlandaise et musique bretonne jusqu’à un éblouissant final pour lequel tous étaient présents sur scène.

CD : The Windening Gyre

Site : https://altan.ie/

HONNEUR AU FEST-NOZ

Le cinq décembre 2012, le fest-noz a été officiellement déclaré par l’Unesco comme faisant partie du patrimoine culturel immatériel de l’humanité.

En prélude au cinquième anniversaire de cet événement important pour la reconnaissance et la sauvegarde d’une part non négligeable de la culture bretonne, le Festival Interceltique avait décidé d’organiser un immense fest-noz au sein de l’Espace Marine.

L’événement se déroulait en deux parties. La première d’entre elles avaient de quoi surprendre car elle mettait en scène un spectacle symphonique.

Cela semble être devenu une tradition, la soirée du Jeudi est consacrée à l’ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE BRETAGNE (OSB). Après avoir accompagné Carlos NUNEZ en 2015 puis Dan Ar BRAZ en 2016, l’OSB s’est joint cette année au duo Erwan HAMON (flûte traversière en bois, bombarde) et Janick MARTIN (accordéon) ainsi qu’à la chanteuse Annie EBREL, autre personnalité conviée. Le guitariste Grégory DARGENT et le percussionniste Antonin VOLSON complétaient la formation.

Cette rencontre a déjà eu lieu en novembre 2016 puisqu’il s’agissait de la création du festival Yaouank de Rennes et il semblait dès lors tout à fait approprié de la renouveler. Au départ, vouloir édifier un croisement entre musique symphonique et musique à danser pouvait s’apparenter à une gageure. Pour inaccoutumé et étonnante qu’elle fut, la soirée n’en demeura pas moins une brillante réussite. Appuyé par une guitare électrique et des percussions, l’ensemble envoyait du son mais respectait les pas de danses (ridées, gavotte, plinn). Le public fut sans doute désorienté au départ par cette débauche sonore mais il finissait par l’oublier et se concentrait sur la musique afin de s’adonner à la danse. On aurait pu craindre l’accordéon, la flûte ou la bombarde noyés dans cet océan de notes. Il n’en fut rien et c’est paradoxalement l’orchestre qui par moments peinait à se faire entendre.

La deuxième partie de la soirée correspondait à un fest-noz plus classique, du moins dans la forme, car les trois formations qui se sont succédé brillaient par leur éclectisme, leur innovation et leur originalité.

Les quatre filles de BARBA LOUTIG, Loeiza BEAUVIR, Lina BELLARD, Elsa CORRE et Anjela LORHO-PASCO, évoluent dans un registre plutôt inhabituel en Bretagne. S’inspirant du groupe vocal occitan LA MAL COIFFEE, elles pratiquent le chant polyphonique. Ce soir-là, Anjela n’était pas présente et était remplacé par Mari LORHO-PASCO. S’accompagnant par moments de différentes percussions, les filles ont alterné les andro, suite loudéac, kas a bar, valse, ridée, chantant aussi bien en breton qu’en français. Les voix s’unissaient et se répondaient harmonieusement.

Avant même la proclamation des lauréats du Grand Prix du Disque Produits en Bretagne, le groupe FLEUVES figurait déjà parmi les artistes invités pour le fest-noz. Le prix du jury leur a donc permis de bénéficier d’une date et d’une exposition supplémentaire le premier soir du Festival. FLEUVES est une formation singulière. Composé de trois instrumentistes, Emilien ROBIC (clarinette) Romain DUBOIS (claviers, programmations) et Samson DAYOU (basse), le groupe distille une musique certes à danser mais que l’on peut tout aussi bien écouter tant elle est raffinée. Pour la soirée fest-noz, le groupe proposait sa formule à cinq en conviant le batteur Antonin VOLSON (qui avait déjà officié en début de soirée lors du fest-noz symphonique) pour la totalité de la prestation ainsi que le trompettiste Youn KAMM, sur plusieurs titres. On se retrouvait là entre musique planante, électro et bien sûr musique à danser. L’ensemble était absolument envoûtant.

AMIEVA est une rencontre entre la musique bretonne à danser et le chant asturien. Le groupe est une émanation, dans une formule plus resserrée, d’une formation qui se nommait auparavant BREIZH ASTURIES PROJECT.

Le quatuor, Clara DIEZ MARQUEZ (chant, percussions), Yann LE NAY (violon), Fañch LORIC (accordéon), et Erwan GANIER (batterie), enchaînait les danses (bourrée, laridé, tour, cercle circassien, mazurka) de manière énergique. La batterie intervenait d’une façon très percutante sans être pour autant assourdissante. Deux invités ont aussi été conviés. Échappée de BARBA LOUTIG, Elsa CORRE venait prêter main forte à Clara au chant et aux percussions traditionnelles tandis que Andrés MONTEAVARO venait renforcer le groupe à la gaïta Il s’agissait là d’un des tous derniers concerts d’AMIEVA car le groupe cesse ses activités.

DUO HAMON MARTIN – ANNIE EBREL – ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE BRETAGNE

CD : Fest noz symphonique http://duohamonmartin.com/

BARBA LOUTIG https://barba-loutig.com/

FLEUVES CD : Fleuves http://www.lusinerie.com/artistes/fleuves/

AMIEVA CD : Amieva https://www.tamm-kreiz.bzh/groupe/6173/

GWENNYN

GWENNYN est devenue en dix ans de carrière l’une des artistes les plus en vue et les plus séduisantes de la musique bretonne. Ses cinq albums, tous très réussis, ont grandement assis la notoriété de la chanteuse. Le dernier CD en date, Avalon, paru fin 2016, ne déroge pas à la règle et figurera sans doute bientôt au panthéon des incontournables.

GWENNYN s’est produite dans la plupart des grands festivals de l’été en Bretagne et Lorient n’a pas été négligé. Elle y a assuré la première partie d’Amy MACDONALD. Le pari n’était pas si évident que cela mais il permettait une exposition intéressante.

GWENNYN était vêtue d’une robe noire créée spécialement pour elle par le couturier Pascal JAOUEN. Elle était également accompagnée par de solides musiciens parmi lesquels on pouvait reconnaître son complice Patrice MARZIN (guitare), Kevin CAMUS (cornemuse irlandaise) ou encore l’ex-AR RE YAOUANK David PASQUET (bombarde).

Les chansons étaient en grande partie des compositions du duo GWENNYN / Patrice MARZIN avec des arrangements pop-rock de ce dernier. La chanteuse a présenté des titres récents (le très entraînant Bravig) et plus anciens (superbe version de Kan ar Bed). Sur We can plinn, GWENNYN débordait d’énergie sur scène et Kevin CAMUS montrait tout l’ampleur de son talent et de sa maîtrise de la cornemuse irlandaise.

En fin de concert, elle a repris le célèbre Son ar sistr, titre qui a depuis longtemps franchi les frontières de la Bretagne et qui figure toujours en bonne place dans son répertoire.

La soirée était extrêmement minutée si bien qu’après seulement trois quarts d’heure, GWENNYN a dû quitter la scène malgré les rappels des spectateurs, visiblement conquis par une artiste que tous ne connaissaient pas et qu’ils n’étaient pas spécialement venus écouter.

Il reste à souhaiter un concert sur une plus longue durée lors d’une prochaine édition pour laquelle GWENNYN serait la tête d’affiche de la soirée.

CD : Avalon

Site : http://www.gwennyn.com/

AMY MACDONALD

Amy MACDONALD faisait partie des grosses têtes d’affiche présentes à Lorient et son concert était de fait très attendu. On ne peut pas qualifier la musique d’Amy de celtique. L’artiste évolue dans une mouvance pop-rock teintée néanmoins d’influences folk. Qui plus est, Amy MACDONALD est écossaise. Tous ces éléments contribuaient donc à justifier sa présence au FIL.

Malgré ce que peuvent en dire certains détracteurs, Amy MACDONALD est une véritable artiste qui est l’auteure de ses chansons et qui n’a rien d’une chanteuse préfabriquée.

Tout le monde a encore en tête son premier tube, qui date néanmoins d’il y a déjà dix ans, This is the life et son entêtant chorus de guitare. Si la couverture médiatique est quelque peu retombée depuis, Amy n’en a pas moins publié quatre CD, dont le dernier en date, Under stars, paru cette année (auxquels peut s’ajouter un album enregistré en concert, plus ou moins officiel).

Dans une ambiance très rock, l’artiste écossaise a enchaîné les titres issus pour une large part du nouvel opus (Under stars, leap of faith) sans oublier évidemment le premier extrait, le très efficace Dream on.

AMY MACDONALD a fort heureusement réservé des moments plus calmes comme pour Never too late soutenu simplement par quelques notes de claviers ou Prepare to fall en s’accompagnant seulement d’une guitare. Sur Down by the water les spectateurs agitaient leur téléphone allumé, en totale communion avec la chanteuse. Évidemment, cette dernière n’a pu faire abstraction du titre que tout le monde espérait, This is the life, mais celui-ci a quand même été assez vite expédié, comme si l’artiste souhaitait démontrer qu’elle ne voulait pas être seulement rattachée à cette chanson.

La machine était bien huilée et fonctionnait admirablement. Pourtant, à la différence de certains artistes pour qui Lorient n’est qu’une simple date dans leur tournée, Amy MACDONALD savait où elle se produisait et à même tenu à prendre le public en photo. Sitôt le concert terminé, elle ne s’est par contre pas attardée.

CD : Under stars

Site : http://www.amymacdonald.co.uk/

RUNRIG

Cela faisait plus de vingt ans que l’on n’avait pas eu le plaisir d’apprécier RUNRIG à Lorient. En cette année de l’Écosse, il semblait logique que le groupe soit enfin appelé à s’y produire à nouveau. Cette venue coïncidait de plus avec la tournée qui suivait la sortie en 2016 du dernier album, The Story.

RUNRIG est devenu depuis sa création en 1973 l’un des meilleurs représentants du rock celtique écossais, à mi-chemin entre le rock de U2 et la musique traditionnelle écossaise. Si le groupe est une référence en Écosse et au Royaume-Uni en général, il ne bénéficie pas de la même notoriété de l’autre côté de la Manche et même en Bretagne, il demeure souvent ignoré du grand public.

Il s’est murmuré que le dernier CD en date pourrait également être le dernier tout court et que cette tournée pourrait aussi être une des dernières. Cela rendait donc le rendez-vous lorientais incontournable surtout qu’il s’agissait en plus du concert de clôture de l’édition 2017.

Dès leur arrivée sur scène, les musiciens avaient décidé de mettre le paquet niveau sonore. RUNRIG a l’habitude de jouer dans des stades et cela s’entendait. Seulement, il se produisait là sous le chapiteau de l’Espace Marine et le son était particulièrement élevé, ce qui nuisait à l’appréciation du spectacle.

RUNRIG alternait les titres récents issus du dernier album (Rise and fall, Onar et le titre éponyme, le magnifique The Story) ainsi que ses classiques (Alba, Harvest Moon, Skye, Maymorning et le très beau Hearts Of Olden Glory).

Loch Lomond, la chanson la plus emblématique du groupe, n’a pas la même ferveur lorsqu’elle est jouée hors d’Écosse mais les écossais présents au concert ne se sont pas fait prier pour reprendre les paroles.

Si on arrivait à faire abstraction de l’excès sonore, il fallait reconnaitre que la musique était superbe. Exceptées quelques notes d’accordéon, il n’y avait pas d’instruments traditionnels. La guitare électrique sonnait par contre parfois comme une cornemuse et il suffisait alors de fermer les yeux pour imaginer se retrouver en Écosse.

Espérons que RUNRIG aura l’occasion de revenir à Lorient pour offrir cette fois une prestation dans de meilleures conditions.

CD : The Story

Site : http://www.runrig.co.uk/

SCÈNE ACADIENNE

La Pavillon Acadien est aujourd’hui un des lieux incontournables du FIL. Quiconque se trouve à Lorient ne pourra pas dire qu’’il a vu le Festival Interceltique s’il n’est pas au moins une fois allé dans cet antre de musique et de fête.

Nombre des artistes qui interviennent au sein du Pavillon ont fait partie d’un spectacle intitulé « L’Acadie, un pays qui se raconte » dont le but était de faire découvrir d’une part l’Acadie et d’autre part sa formidable scène musicale.

A Lorient, c’est sous l’appellation « Expérience Acadie » que les différents artistes se produisaient. Certains musiciens apparaissaient d’ailleurs dans plusieurs formations.

THE BACKYARD DEVILS est un quatuor qui façonne une musique que l’on peut qualifier de bluegrass et de country dans un style qui lui est cependant propre.

Composé de Erik ARSENAULT (voix principale, guitare acoustique), Christien BELLIVEAU (guitare électrique, voix), Dillon ROBICHEAU (banjo, mandoline, voix) et Rémi ARSENAULT (contrebasse, voix), le groupe utilisait seulement des instruments à cordes et faisaient donc l’impasse sur une batterie. Alignés sur le devant de la scène, aucun des membres ne prenait l’ascendant sur les autres.

Le chant était uniquement en anglais. Le chanteur s’exprimait néanmoins en français lorsqu’il s’adressait au public et d’une voix claire, voix qu’il éraillait lorsqu’il chantait donnant ainsi un côté plus rugueux aux chansons. THE BACKYARD DEVILS se sont également produits à deux reprises sur la grande scène de l’Espace Marine en première partie de DIXEBRA et de RUNRIG.

La musique et le visage des membres de SECONDE NATION n’étaient pas sans rappeler quelque chose aux assidus du pavillon Acadien et à juste titre. En effet, trois des quatre musiciens, Dominique BREAU (chant, podorythmie), Julien BREAU (contrebasse, voix) et Marie-Andrée GAUDET (violon, voix), officiaient auparavant au sein du groupe PRENEZ GARDE qui a fait les belles heures dudit pavillon ces dernières années. Le quatrième membre, Jacques BLINN (guitare, mandoline, voix) officie également au sein du groupe CY, non présent à Lorient cette année, dont le second album en date se nomme d’ailleurs Deuxième nation.

Le répertoire était dans la même veine et n’incitait pas à la mélancolie. Dominique BREAU possède toujours cet inénarrable talent de conteur hors pair (Le mal de dents). L’ensemble produisait un spectacle énergique et déjanté.

Présente pour la première fois à Lorient l’année dernière, MAGGIE SAVOIE est revenue en 2017 pour un véritable marathon puisqu’elle évoluait sous deux facettes.

Comme en 2016, on a pu la découvrir en formule trio entourée de Marie-André GAUDET au violon et de Rémi ARSENAULT à la contrebasse. Maggie s’accompagnait d’une guitare et d’une mini-batterie qu’elle actionnait avec les pieds. Les chansons parlaient de voyages, de la vie et de l’Acadie, où même avec une température de « vingt-sept sous zéro, le monde dit qu’il fait beau », le tout dans un style folk, country blues agréablement prenant. Sur La route qui dévore, Marie-Andrée troquait son violon et son archet contre des baguettes et une caisse claire.

Autre aspect de sa personnalité artistique, Maggie officie également au sein du groupe LES BLUCHARMS qu’elle a créé avec sa sœur Isabelle SAVOIE (mandoline, basse), Louise POIRIER (batterie) et Marie-Christine ARPIN (guitare). La formation tient son nom d’une mouche à pêcher. On naviguait là dans un univers plus country-rock. Les quatre filles nous chantaient leurs « tounettes », selon leur terme, parlant de leur vie et de leurs expériences avec de très belles parties instrumentales où les cordes étaient reines.

Entretien avec Maggie SAVOIE
Comment as-tu démarré la musique ?

Quand j’avais dix ans, ma sœur jumelle voulait apprendre la guitare. Mon père étant musicien, il nous a assises toutes les deux l’une à côté de l’autre et nous a appris quelques accords. Je me suis ensuite enfermée dans ma chambre pour continuer à travailler tout ça. Donc ça date depuis longtemps. Après mon secondaire, j’ai fait deux ans en guitare classique à l’université de Moncton. J’ai cependant mis la musique de côté pour une vie de nomade pendant huit ans. Il y a trois ans, j’ai décidé de m’y remettre plus sérieusement.

Qu’est ce qui t’inspire en général ?

J’aime vraiment beaucoup de styles différents comme le blues, les musiques du monde, le flamenco, le manouche, la musique latine, l’électro, le folk, le rock, le jazz, etc, donc musicalement mon inspiration vient d’un mélange de tout ça. Mais il y a des endroits qui m’inspirent plus que d’autres, par exemple la forêt. C’est mon chez moi, et c’est là que je me sens le plus fidèle à moi-même, le plus authentique. Le côté vrai, cru de la nature me donne une très grande inspiration à faire de la musique qui reste authentique.

Tu es présente avec ta propre formation et également avec LES BLUECHARMS. Pourquoi ces deux facettes ?

J’ai recommencé à faire de la musique avec les BLUECHARMS. C’est ma sœur Isabelle SAVOIE, mes deux amis Marie-Christine ARPIN et Louise POIRIER, qui m‘ont remis dedans, à faire de la musique simplement pour le plaisir. Avec elles, le but est de se faire plaisir, de se laisser aller en faisant de la musique entraînante.

Le projet Maggie SAVOIE a commencé par quelque chose de beaucoup plus personnelle. J’ai enregistré des chansons plus personnelles et tranquilles qui traînaient dans mon tiroir. Puis, sans avoir aucun but, je les ai dévoilées au public. L’intérêt a été beaucoup plus grand que ce à quoi je m’attendais. J’ai ensuite rencontré Marie Andrée GAUDET et Rémi ARSENAULT pour devenir une formule trio.

Composes-tu de la même façon pour l’une et l’autre des formations ? Sais-tu à quelle formation est destinée une chanson lorsque tu écris ?

Avec les BLUECHARMS, on compose pas mal tous ensembles. Souvent, je trouve des « riffs » de guitare et on amène ça ensemble, puis les paroles sont souvent composées par Marie-Christine ou toutes les filles ensembles. J’ai toujours pas mal une idée à quel projet la musique que je compose sera destiné de par le style que j’y mets.

Pour le projet Maggie SAVOIE, je pars souvent avec la musique d’abord et les paroles ensuite. Quand je compose pour mon projet, j’ai tendance à expérimenter un plus musicalement.

Tu joues beaucoup en dehors de l’Acadie ? Si oui, ou te produits-tu ?

À date, j’ai beaucoup joué en France et j’ai fait une tournée en Suisse. 

Tu as fait partie du spectacle « L’Acadie, un pays qui se raconte ». Était-ce une expérience intéressante et enrichissante ?

Pour une artiste comme moi, qui n’avais aucune expérience de scène, ça été l’expérience d’un grand apprentissage. Étant quelqu’un de très timide, je ne croyais jamais être capable de partager ma musique devant un public. Avec le grand nombre de représentations, j’ai fini par prendre beaucoup d’aisance sur la scène.

C’est ta deuxième année à Lorient. Connaissais-tu le Festival avant d’y venir ? Quel est ton sentiment ?

J’en avais entendu parler un peu, mais je ne le connaissais pas beaucoup. C’est une expérience assez intense qui est hors de l’ordinaire pour un artiste qui commence comme moi. Avec le pavillon rempli d’un public énergique comme celui-là, tu te retrouves un peu comme sur un nuage. L’écoute attentive et l’appréciation du public restent quelque chose de très enrichissant pour les artistes acadiens. De plus, j’ai pu me promener un peu dans les autres pavillons. Les gens sont en feu et le partage musical est super « trippant ». Ça permet de s’ouvrir sur des cultures celtiques autres que l’Acadie et pour ma part, c’est quelque chose de super important pour agrandir mon horizon musical. 

Cette expérience au Festival Interceltique peut-elle influencer ta musique ?

Comme je viens de le mentionner, le fait de découvrir d’autres musiques influence toujours la musique qu’on fait, souvent sans s’en apercevoir. Tu vois aussi, en tant que musicien, ce qui fonctionne avec un certain public et ce qui marche moins bien. Pour ma part, ce festival a beaucoup influencé l’EP On court que j’ai sorti en juillet 2017. Je voulais offrir au public un disque qui représentait bien ce que je leur présentais en spectacle. À Lorient, on aime que ça bouge. J’y suis donc allé avec des compositions qui bougent un peu plus que mon premier album. Étant en pleine production d’un nouvel album, j’ai décidé d’y aller sans trop penser à ce que je devais jouer pour faire bouger les gens, c’est à dire d’y aller vraiment avec ce que je sentais sans penser au reste. Cependant, j’avoue qu’il doit y avoir des soupçons du Festival Interceltique dans les nouvelles chansons, car c’est une expérience qui marque fort la carrière d’un artiste émergent.

THE BACKYARD DEVILS – CD : Honkytonk heartbreaker https://thebackyarddevils.bandcamp.com/

SECONDE NATION – CD : Le p’tit bonhomme https://www.facebook.com/Seconde-Nation-515330115522696/

MAGGIE SAVOIE – CD : On court https://fr-fr.facebook.com/Maggiesavoiemusique/

LES BLUECHARMS – CD : Finance moé https://fr-fr.facebook.com/lesBluecharms/

DJIBOUDJEP

Si le FIL démarre chaque année par les manifestations incontournables que sont la cotriade, le championnat des bagadou et la grande parade, il se termine par un événement tout aussi majeur et appréciable avec la prestation du mythique groupe de chants de marins DJIBOUDJEP.

Le groupe a connu bien des tempêtes au cours de sa longue carrière mais Mikael YAOUANK qui est le pilier et le seul rescapé de la formation d’origine est toujours bien présent et il était entouré de Nicolas LE RALLIC (ex-SHANGAIE) et de Guillaume YAOUANK (par ailleurs membre de RHUM & EAU).

RHUM & EAU, duo de chants de marins bien connus sur Lorient, a régulièrement joué avec le groupe de la région parisienne SPAMS, plus spécialisé dans un détournement de chansons françaises ou internationales très connues et parfois de musique celtique.

Il n’y avait dès lors qu’un pas à franchir pour que les SPAMS se retrouvent cette fois associés à DJIBOUDJEP.

Cette combinaison a évidemment complètement changé l’approche que l’on pouvait avoir du répertoire maritimes de DJIBOUDJEP, lui donnant par moments un côté plutôt musclé à l’image de ce qu’avait pu faire Michel TONNERRE, l’autre membre fondateur du groupe. Ainsi Quinze marins, soutenu par la batterie et la guitare électrique, prenait un tournant très rock. Moins brutal mais tout aussi éclatant, le touchant Mon p’tit garçon s’en trouvait renforcé

On a cependant pu apprécier le DJIBOUDJEP conventionnel avec Su l’pont d’Morlaix, Fanny de Laninon, Les filles de Lorient ou encore John Kanak a cappella repris en chœur par le public

Comme il se doit, afin de respecter une tradition non-saisonnière, Petit papa noël n’a pas été oublié.

On en sait pas s‘il s’agissait là d’un concert unique ou si l’aventure sera prolongée. Celle-ci aura cependant permis de redécouvrir le répertoire de DJIBOUDJEP sous un angle intéressant qui en plus lui sied à ravir.

LE OFF

Cela fait plusieurs années qu’on le constate, malgré quelques sursauts lors de certaines éditions, le OFF du Festival Interceltique peine à se relever et à se réinventer.

De nombreux programmateurs profitent allègrement de la notoriété de l’événement et de ses retombées. A défaut d’y participer financièrement, peut-être pourraient-ils faire l’effort d’y participer artistiquement. On ne peut plus dans certains cas parler de Festival interceltique OFF mais bien d’un festival alternatif, tant la musique proposée (rock, reggae) n’a strictement plus rien de celtique.

Le Directeur du FIL a lancé, à raison, un pavé dans la mare en invitant les différents protagonistes du OFF à respecter un niveau qualitatif car il impacte l’image générale du Festival.

Une approche entre les deux parties devrait avoir lieu. Espérons qu’elle puisse aboutir à une entente.

Si les différents pavillons des Pays Celtes font partie intégrante du Festival, les artistes qui s’y produisent, hormis sur le pavillon du pays mis à l’honneur et sur celui de l’Acadie, ne figurent pas toujours dans le programme officiel du FIL. On pourrait presque dans ce cas précis parler de OFF officiel.

SKARN

SKARN est un groupe de la région de Rennes qui s’est formé en 2010. A l’époque, le groupe se nommait KÊRIS et suite à des changements de personnes, il a continué l’aventure sous un nouveau nom. SKARN navigue dans les eaux de ce que l’on appelle le folk-métal ou plus exactement, dans le cas précis, le métal fest-noz.

Les six membres ont littéralement enflammé la petite scène sur laquelle ils se produisaient, débordant parfois sur la rue. La solide partie rock, deux guitares électriques, basse et batterie, rivalisaient avec le violon et la cornemuse pour créer une musique à danser sur lequel venait se poser le chant en breton. SKARN aurait d’ailleurs pu participer à la soirée Honneur au fest-noz. Même s’il aurait certainement heurté les plus intransigeants adeptes du conservatisme, il ne serait pas apparu discordant auprès des progressistes. On peut désormais souhaiter que le groupe se retrouve programmé sur une des scènes officielles du FIL afin de l’apprécier dans de meilleures conditions.

Entretien avec SKARN
Pouvez-vous présenter le groupe ?

Stéphane : je suis batteur.

Antoine : Je suis bassiste. Nous sommes six musiciens de rock celtique ou de folk métal, tout dépend de ce qu’on veut mettre comme case. Grosso modo, il y a une grosse base rythmique de rock, un peu dur, avec deux guitares, une basse et une batterie et par-dessus viennent deux instruments traditionnels, violon et cornemuse, qui allègent un peu la structure et qui donnent le côté celtique des morceaux. On fait essentiellement des compos. Il y a quelques thèmes qui sont empruntés au trad mais peu. Le chant est exclusivement en breton.

Le groupe existe depuis longtemps ?

Antoine : Le groupe a un petit peu évolué, la formation a un peu changé. Le nom a changé aussi. La structure actuelle date de cinq-six ans.

Auparavant le groupe s’appelait KÊRIS. Pourquoi ce changement de nom ?

Antoine : Parce qu’on avait changé la composition. On ne voulait pas que KÊRIS continue sans le guitariste-chanteur qui en était à l’origine. Du coup, on a décidé de changer le nom.

Il y avait eu un groupe KERIS à la fin des années 70. Vous n’avez pas eu de soucis ?

Antoine : Non. Mais à l’époque de KÊRIS, on tournait moins que SKARN maintenant. Je pense qu’on n’est jamais passé au-dessus des radars. Par contre, des SKARN, il y en a un petit peu, mais pas en France. Il y a un gros SKARN en Espagne, mais on l’a su après.

Justement, que signifie le nom ?

Antoine : SKARN, ça veut dire « décharné » en breton. On avait fait des listes de noms en breton et on voulait un nom assez court, une consonance un peu rock et une bonne sonorité. SKARN, ça nous correspondait. Quand le nom est arrivé, on était tous d’accord. On s’est dit : « C’est ça ! »

Stéphane : c’est un nom qui attaque avec une consonance un peu agressive comme ce qu’on aime jouer.

On qualifie votre musique de fest-noz métal. Vous vous produisez plutôt en fest-noz ou dans une formule concert ?

Stéphane : On se produit dans les deux. Notre répertoire est basé sur de la musique bretonne à danser. On a néanmoins deux répertoires. Le plus important, c’est le fest-noz. On a cependant développé dernièrement un peu plus le répertoire concert.

Vous avez une formation de musique traditionnelle ou vous avez choisi cette voie parce qu’elle vous plaisait ?

Stéphane : je n’ai même pas du tout de bagage musical puisque je n’ai jamais pris de cours de batterie. Avant SKARN, je jouais plus du pop-rock, un peu plus passe-partout, on va dire. La partie traditionnelle est réellement apportée par Moran à la cornemuse et Marie au violon et également par Thomas, le guitariste, qui vient du monde du fest-noz. On a réussi à le ramener vers la partie rock du groupe et il est notre trait d’union.

Antoine : Moran fait partie du BAGAD KEMPER en fait et il a un gros fond trad. Marie est beaucoup branchée musique irlandaise.

Concernant la partie métal, quelles sont vos influences ?

Antoine : la partie métal, c’est plutôt moi et Goulven, le guitariste. Goulven est plutôt sur du métal un peu plus dur que du heavy. En ce qui me concerne, je suis plus sur du death, du grind, des choses assez violentes. J’écoute du métal depuis très longtemps, depuis 1990.

Stéphane : En 1990, j’écoutais du SARDOU (rires). Ensuite, je me suis mis un peu plus au rock avec PLACEBO, ce genre de groupes un peu plus pêchus, mais jamais dans le pur métal. Le métal ou on chante le growl, j’apprécie moyennement.

Antoine : Moi, j’aime beaucoup. J’aime beaucoup le new metal. Je suis un grand fan de SUP (SPHERICAL UNIT PROVIDED). RAMMSTEIN, c’est très bien aussi.

Votre musique pourrait évoluer de manière plus conséquente vers ce style ?

Antoine : Le but est vraiment de garder cette grosse rythmique rock derrière et d’évoluer un peu vers ça. On a fait des concerts pur métal avec d’autres groupes comme DUR DABLA. Clairement, On n’est pas les plus dur mais on est dans notre élément. Si tu restes dans le domaine du folk métal, on n’est vraiment dedans.

Vous venez d’Ille Et Vilaine. Le chant en breton, c’est un choix militant ou c’est seulement parce que Moran est bretonnant ?

Antoine : Moran est parfaitement bilingue. Il donne même des cours car il est prof de breton. Effectivement, c’est militant et puis il y a un aspect artistique original. C’est clairement pour développer la culture bretonne. On est peut-être le seul groupe de folk métal qui ne propose que du chant en breton.

Stéphane : C’est une étiquette dont on est fière. On n’en parle mais trop mais personnellement je suis assez fier d’avoir du chant en breton dans le groupe. Le dernier morceau en anglais, ça m’a un peu coûté.

Antoine : C’est anecdotique !

Stéphane : Je l’espère !

Vous êtes professionnels ou amateurs ?

Antoine : On est amateurs.

Stéphane : Il n’y a que des travailleurs dans ce groupe (rires).

Vous tournez ailleurs qu’en Bretagne ?

Stéphane : On essaie de tourner un peu ailleurs. On joue là où on nous demande de jouer. Globalement, on joue majoritairement en Bretagne. On a déjà joué dans le 44, on est allé jusqu’à Brest et puis en Mayenne, mais plus en fest-noz. On va dire qu’on s’arrête au grand Ouest pour l’instant.

C’est votre première participation au Festival Interceltique OFF. Qu’en avez-vous pensé ?

Stéphane : LE OFF fait un peu penser à la fête de la musique. Parfois on se demande ce que certains groupes, qui ne sont pas forcément très celtiques, font là ! On perd un peu l’image celte du Festival. C’est dommage ! Le IN, on est clairement dedans, c’est du pur celte avec différentes origines.

Le public réagit bien à vos prestations ?

Antoine : Pour le public, un peu la fête de la musique. On joue dans un bar, ça passe, il y a des gens qui s’arrêtent, il y a des gens qui restent, il y en a qui reviennent. Ça papillonne pas mal ! C’est le principe, on le savait bien. Mais ceux qui restent sont plutôt réceptifs.

Vous avez sorti deux EP autoproduits à l’esthétique très travaillée.

Antoine : Le but n’était pas de proposer simplement un truc en carton avec le nom du groupe et le contact derrière. Dans le deuxième EP, il y a la traduction des paroles. On essaye de travailler l’apparence pour que l’objet soit joli. Le digipack est mieux qu’un CD cristal.

Goulven : Ça fait partie d’une démarche globale. On essaye de travailler sur autre chose que simplement la musique. On bidouille des éclairages, on a fait une bannière.

Stéphane : On est à la recherche de visuels. On essaye de sortir de la pure musique.

Antoine : C’est la démarche de SHAKA PONK, en plus petit (rires). Au départ, ils ont bidouillé. Le but, c’est ça.

Vous avez un projet d’album longue durée ?

Antoine : On n’a pas encore de date, mais on a un projet. On est content du son du deuxième EP mais pas du premier. Ce dernier a été enregistré en deux fois et il y a deux niveaux. On arrive à un stade ou effectivement on aurait la possibilité d’enregistrer dix titres bien. L’album, c’est une autre démarche. On espère que ça va se faire.

On peut espérer vous revoir en 2018 ?

Antoine : Avec plaisir. On aimerait bien revenir. J’aimerais bien essayer le stade (rires) !

CD : Yenijenn

Site : https://skarn.bandcamp.com

NATACHA LARNAUD

Nous avons déjà eu l’occasion d’évoquer Natacha LARNAUD en chroniquant son premier CD, À cordes éperdues. Natacha se produisait seule avec sa harpe sur le port de plaisance de Lorient aux abords de l’Office du Tourisme. L’exercice n’était pas évident car il n’est jamais facile d’attirer l’attention de passants soumis généralement à un déluge de décibels. Ceux qui se laissaient malgré tout tentés tombaient vite sous le charme d’une artiste authentique et n’hésitaient pas pour certains à esquisser quelques pas de danses.

Entretien avec Natacha LARNAUD
Que représente le FIL pour toi ?

C’est un rendez-vous annuel que je retrouve avec bonheur chaque année. C’est aussi l’occasion de retrouver les gens qui viennent à ma rencontre pour écouter ma musique ou pour danser, d’avoir cet échange, de renouveler le répertoire de façon à ne pas proposer tous les ans la même chose et de profiter du festival par la même occasion.

Tu te produis d’une manière qu’on pourrait presque appeler le OFF du OFF. Ce n’est pas trop difficile ?

Un petit peu. Ce sont surtout les haut-parleurs qui tournent dans la journée donc je choisi mes horaires en fonction, à partir de dix-neuf heure. Cela me permet d’être un peu plus tranquille et d’être aussi sur une période de creux entre le moment où les gens qui ont passé leur après-midi au festival vont manger et le moment où ils reprennent les concerts à vingt-deux heure sur les différents pavillons.

Tu es donc harpiste. Comment as-tu découvert l’instrument ?

En fait je ne me souviens pas précisément de cette rencontre. J’étais toute petite et à l’époque je chantais. Dans un spectacle, à ce que m’ont dit des parents, il y avait une harpe classique. A la rentrée suivante, je disais à mes parents que je voulais faire de la harpe. J’ai commencé sur la harpe celtique qui était l’instrument à taille approprié pour les enfants. En général tous les enfants commencent sur la harpe celtique même ceux qui font de la harpe classique. J’ai testé un peu la classique mais je me suis cramponné à la harpe celtique. Elle me correspondait le mieux parce qu’il y a le répertoire qui y est attaché et le son qui est celui que j’aime par-dessus tout.

Tu as eu une formation dans une école de harpes ?

Oui, j’étais au conservatoire de Lorient. J’ai fait les douze années de conservatoire, les trois cycles de quatre ans, avec la même enseignante, Nolwenn PHILIPPE. C’est surtout après cette formation, que j’oserais dire académique, que je me suis mise à travailler plus l’oreille et les morceaux qui me plaisaient le plus dans la musique celtique en allant piocher, surtout pendant le Festival Interceltique, les airs que j’entendais qui étaient pour moi de véritables coups de cœur et que je me suis appropriés. Sachant que c’était des airs traditionnels, je me permettais de les jouer sans aucune modération et visiblement pour le public ce sont des airs qu’ils aiment retrouver chaque année.

Il y a des harpistes qui t’ont influencée, qui t’ont inspirée ?

J’aime beaucoup le travail de Tristan LE GOVIC et de Clotilde TROUILLAUD. Ils ont des arrangements très intéressants qui sont une source d’inspiration pour les arrangements que je réalise maintenant, sachant que je réalise beaucoup d’arrangements mais peu de compositions. Ma seule composition est une co-composition avec un accordéoniste. Pour le moment je ne me suis frottée qu’aux arrangements et un tout petit peu à la composition mais ça viendra peut-être par la suite.

Tu comptes la développer ?

J’avoue ne pas m’y mettre beaucoup mise pour le moment. J’essaye, je tâtonne un peu et pour le moment, ce n’est pas forcément mon projet premier, on va dire.

Tu es une artiste amateur ?

Oui, on peut dire ça dans le sens non-professionnel. Dans le même temps, j’ai eu quelques cachets grâce à l’instrument mais ça n’a jamais été très professionnalisé. Ce n’est pas forcément mon objectif puisque j’ai mon métier de médiatrice culturelle à côté. Mais pourquoi pas par la suite ! Si je me pose davantage dans une ville, j’aimerais beaucoup monter une formation et peut-être sur un plus long terme envisager une voie professionnelle.

Tu te produis beaucoup ?

Surtout au Festival ! Mais également sur l’année dans ma région d’adoption maintenant qui est la Touraine. Je joue beaucoup à Tours ou j’organise des bals sauvages avec des amis. Quasiment à chaque bal sauvage, j’apporte ma harpe et je fais danser les gens qui sont du coup moins amateurs du breton, aussi ça m’a amené à développer un autre répertoire issu d’airs traditionnels qu’on peut trouver dans le Berry. Je me mets à la bourrée trois temps. C’est aussi une expérience très enrichissante pour la musicienne que je suis de rencontrer d’autres musiciens issus d’autres cultures que la culture bretonne. Cela me plaît beaucoup aussi.

Tu te produis toujours en solo ou il y a parfois d’autres musiciens avec toi ?

Très souvent avec d’autres musiciens. Ensuite, ça peut dépendre. Je peux jouer le rôle d’accompagnatrice et parfois c’est moi qui vais proposer des airs et d’autres musiciens me rejoignent à l’occasion, des guitaristes, un accordéoniste, un peu tous les instruments, suivant ce qui se présente. C’est justement l’optique des bals sauvages qu’on propose, tous les musiciens peuvent venir. J’ai rencontré de très bons musiciens et c’est un vrai plaisir de partager avec eux ces moments-là et, comme je l’ai dit, d’apprendre aussi d’autres morceaux et de développer d’autres répertoires.

Tu chantes également.

Un petit peu (rires) ! J’ai essayé de le développer un peu cette année mais sans vraiment aboutir à des morceaux que j’oserais présenter, surtout que ce sont des reprises de morceaux composés par d’autres. Sur le plan éthique, sachant que je n’ai pas demandé l’autorisation aux auteurs de les chanter et de les jouer, dans un premier temps je préfère les garder pour moi ou pour mon cercle très restreint d’amis.

Tu es aussi la harpiste du groupe de zouk-celtic PHILLING.

Non, je ne le suis plus. Je n’avais pas le temps avec mes études. Je n’arrivais plus à concilier les deux. Il y avait très peu de dates et ça faisait beaucoup de travail pour peu d’occasions de jouer. Je ne m’y retrouvais pas trop sachant que le groupe est basé en région parisienne. C’était un peu compliqué. Mais c’était une très belle expérience qui m’a énormément enrichie.

Ce n’était pas que de la musique celtique. Cela n’a pas été trop difficile pour toi de t’adapter ?

Ça a été effectivement assez difficile dans un premier temps. Je ne connaissais pas du tout la musique zouk en tant que musicienne, aussi ça a demandé un gros travail d’adaptation sachant que je faisais les arrangements. Je n’avais jamais fait ça auparavant et finalement, ça a été un travail en partant d’abord de ce que je connaissais de la musique celtique pour l’amener au zouk sachant que j’étais avec des musiciens qui eux était dans une posture inverse, c’est-à-dire qu’ils connaissaient le zouk et pas la musique celtique. Au final, ça a été un vrai travail d’échange avec toute l’équipe et une très bonne expérience qui a touché à son terme pour moi cette année mais qui reste vraiment un très bon souvenir.

Connais-tu la langue bretonne ? Chanterais-tu dans cette langue ?

Oui, pourquoi pas apprendre un jour le breton. Pour le coup, c’est une chose que j’ai en tête. J’aimerais avoir le temps de m’y mettre. Après, le temps, on peut le trouver. En étant en Touraine, j’ai moins cette imprégnation de la culture bretonne que lorsque j’étais à Nantes où j’ai découvert la danse bretonne. Mais ça reste une des choses que j’ai en tête !

Tu as déjà enregistré un CD. Y-a-t-il quelque chose en projet ?

Je parlais justement de ce répertoire que je développe de plus en plus avec des morceaux qui ne sont pas issus du répertoire breton. Si j’ai le temps de m’y consacrer, pourquoi ne pas enregistrer ces nouveaux airs. J’aimerais beaucoup, surtout que j’ai commencé à les arranger. A voir pour l’année prochaine, peut-être !

CD : À cordes éperdues
Site : https://soundcloud.com/natacha-larnaud

ULTRÄQÄNS

Bien que présent pour la première fois à Lorient, le groupe ULTRÄQÄNS a déjà dix ans d’existence. Originaire de La Corogne et totalement indépendant, les quatre musiciens officient dans un style unique difficilement définissable, tour à tour rock, funk, ska mais aussi folk et traditionnel avec des accents psychédéliques. Le groupe définie d’ailleurs sa musique de « Galician Powerfolk » et se décrit comme « un gros chien à quatre pattes et une queue » car le combo peut pour certaines occasions bénéficier d’un cinquième membre au saxophone.

Mais à Lorient, c’est sous le format en quatuor (guitare, basse, batterie et flûte) que le groupe s’est présenté. Il a carrément mis le feu au pavillon galicien en assurant trois prestations par jour pendant toute la durée du FIL. On avait rarement vu le pavillon exulté de cette manière entre des musiciens emplis d’énergie et un public en osmose totale.

La musique faisait parfois penser à GWENDAL, à JETHRO TULL ou à leurs homologues asturiens de DIXEBRA. Le chant était minoritaire mais les paroles étaient interprétées en langue galicienne.

Une année de la Galice se profilant, ULTRÄQÄNS pourrait très bien en être un des fers de lance.

CD : Ulträqäns II

Site : https://myspace.com/ultraqans

EVE GOODMAN

Eve GOODMAN est une jeune chanteuse galloise qui réside actuellement dans les Cornouailles. Elle s’est produite sur le pavillon gallois mais également sur le pavillon commun aux Cornouailles et à l’Ile de Man.

Avec son guitariste Ben et sa choriste Megan, Eve a présenté aux passants, qui s’arrêtaient volontiers pour rester l’écouter, une musique aux accents folk, sans fioritures, ni artifices. Le répertoire était en anglais mais il comprenait une chanson en gallois, Dacw ‘Nghariad. Malgré ce côté dépouillé, l’attention ne faiblissait pas

Eve communiquait volontiers avec le public, en anglais, précisant non sans humour que lorsqu’elle ne se produisait pas sur la scène pavillon, elle vendait des glaces. Elle a cependant promis de revenir l’année prochaine et de parler français.

Le public, en majorité masculin d’ailleurs, se pressait pour se procurer un CD et le faire signer par la chanteuse démontrant qu’il n’était pas seulement sensible à sa voix.

CD : Low sun

Site : http://www.evegoodman.co.uk/

BRAZATAK

Vers la fin des années 90 et durant les années 2000, le groupe KREPÔSUK a fait les belles heures du OFF avec son répertoire rock, aux consonances celtiques néanmoins très prononcées, allant jusqu’à figurer dans la programmation officielle. Après un ultime CD sous le nom de KREPÔ, le groupe s’est finalement séparé en 2011.

Six ans plus tard, le violoniste Ludovic FABRE était de retour avec une nouvelle formation, encore plus rock mais possédant tout de même des influences celtiques.

Le répertoire faisait la part belle aux compositions avec des chansons aux textes qui, sans être revendicatifs, appuyaient parfois là où ça fait mal comme Tukumul, dans lequel certains politiques pourront se reconnaître, ou encore Syrien n’est fait.

Mais, Lorient oblige, les musiciens puisaient également dans le répertoire celtique avec quelques reprises (Thousand are sailing des POGUES).

Entretien avec Ludovic FABRE
Ludovic, tu es le violoniste de BRAZATAK. Peux-tu nous présenter le groupe ?

BRAZATAK est un groupe de rock avec plein d’influences, notamment celtisantes, un petit peu irlandaises par le violon, mais c’est du rock avant tout. Il y a des aspects festifs et des sujets de société, des chansons un peu engagées. C’est assez varié dans l’esprit de ce qu’on faisait avant avec KREPÔSUK.

Justement, le groupe est né des cendres de KREPOSUK. Comment as-tu reconstitué un groupe ?

Après la dissolution de KREPÔSUK, je voulais repartir dans le même style. Ça a pris beaucoup de temps. J’ai contacté des copains musiciens qui sont tous, comme moi, de la ville du Mans, excepté Claude, le bassiste, qui est de Paris. Progressivement, ça s’est remonté. Il y a Nano, le guitariste principal et surtout compositeur. On est deux à composer les morceaux mais c’est surtout lui qui a apporté la majorité. Ensuite, il a Manu K, le chanteur, qui s’accompagne aussi à la guitare électrique. Il y a deux morceaux où il y a deux guitares électriques qui donnent un son bien énergique. Il joue aussi de la guitare acoustique sur des morceaux plus doux. Il y a Claude à la basse, Stéphane, un batteur très énergique et moi au violon.

C’est du rock celtique mais avec une base très rock.

On ne veut pas avoir l’étiquette rock celtique. On veut cibler assez large. On va, on peut dire, vers le pop-rock à influences irlandaises. Ça dépend des morceaux mais c’est un peu plus rock que ce qu’on faisait avec KREPÔSUK, moins bretonnant puisqu’il n’y a pas de bombarde, mais tout aussi énergique.

Vous êtes originaires du Mans, une région non celtique. Est-ce que vous vous produisez là-bas et comment le public vous perçoit-il ?

On n’a pas de recul pour le moment. C’est difficile à dire parce qu’on est tout nouveau, tout récent puisqu’on a un an et demi d’existence. On a commencé par se former, faire des répétitions et, travailler. On a profité de la Saint Patrick pour aller quand même vers cette couleur. A côté du mans, la ville de Saint-Saturnin nous a programmés pour la Saint Patrick parce que c’était là la dernière date qu’on avait fait avec KREPÔSUK. Comme tu l’as dit, il renaît tel le phœnix. D’ailleurs il y a une chanson qui s’appelle Phoenix qui relate un peu ça. Notre premier concert c’était donc le dix-sept mars 2017.

C’est votre première année à Lorient alors que le groupe est tout récent.

En fait, c’est FFR qui était prévu mais ils se sont désistés. On nous a appelés pour les remplacer. J’avais déjà démarché avant.

Vous tournez beaucoup ?

On espère tourner beaucoup. On a quelques dates chez nous après. Il faut être patient. On essaiera de revenir l’année prochaine.

Vous vous êtes déjà produits dans d’autres festivals ?

Non, pas avec BRAZATAK ! On voudrait profiter de Lorient pour approcher des programmateurs.

Voire le IN !

On aimerait bien !

Vous êtes un groupe professionnel ?

Oui ! La plupart sont intermittents de spectacle, d’autres sont dans l’enseignement de la musique.

Vous interprétez principalement des compositions ?

Oui, sauf ici à Lorient ou on a métissé le répertoire avec des reprises des POGUES, des traditionnels rock. Ce n’est pas le mot traditionnel qui est adapté mais il y a des chansons irlandaises rock comme The foggy dew, Whisky in the jar pour aller vers le festif afin de correspondre à Lorient. Sinon, BRAZATAK c’est d’abord des composions.

Vous avez un CD ?

On a fait un CD cinq titres qui est un enregistrement public du premier concert du 17 mars.

Il y a un album en préparation ou vous prenez votre temps pour avoir suffisamment de compositions ?

Pour l’instant, on a une vingtaine de compositions donc ça pourrait se faire. On prévoit ça pour fin 2018, le temps de tourner, de se roder avant.

CD : Brazatak

Site : http://brazatak.free.fr/

KORRIGAN’S CELTIC ROCK

KORRIGAN’S CELTIC ROCK (KCR) est, comme son nom l’indique, un groupe de rock celtique qui nous vient de Franche Comté. Il s’est d’abord créé en 2009 et après une dissolution il s’est reconstitué en 2012. 2017 marquait enfin la première apparition du groupe à Lorient.

Vêtus de kilts sur scène, les cinq musiciens de KCR proposaient une musique celtique aux fortes assises rock (deux guitares électrique, basse, batterie) dans laquelle la bombarde, les flûtes et la cornemuse trouvaient néanmoins leur place. Sur des paroles et des rythmes festifs, le groupe a conquis le public lorientais.

Entretien avec KORRIGAN’S CELTIC ROCK
Vous existez depuis combien de temps ?

On a la formation depuis 2012. L’année dernière, on a fait vingt-trois concerts. Cette année, on finira la saison avec vingt-cinq. Le 31 octobre, on joue pas loin de chez nous avec les RAMONEURS DE MENHIRS. On a aussi déjà joué avec SOLDAT LOUIS.

On va préciser que vous ne venez pas de Bretagne. On a peut-être reconnu l’accent.

On vient de Franche Comté, vers Belfort, Besançon, vers la Suisse, l’Allemagne. On s’expatrie un petit peu.

Je m’adresse au plus bretonnant de tous, du moins du point de vue de l’instrument, un sonneur dans un groupe de rock en dehors de la Bretagne, ce n’est pas banal. Qu’est-ce qui vous a donné envie de faire ça ?

La passion de la musique tout simplement, la découverte de ces instruments. Lors de vacances sur Pontivy, j’ai connu un bon copain qui m’a mis ma première bombarde entre les mains. J’ai soufflé dedans et quelques notes sont sorties et là tout de suite, ce fut le grand frisson.

Vous exportez ou vous importez, je ne sais pas dans quel sens, le rock celtique sur le Territoire de Belfort.

Ce qu‘on aime, c’est avoir une base rock, des grosses guitares, la saturation, une influence punk genre DROPKICK MURPHYS, PADDY AND THE RATS ou des groupes comme ça. On aime mélanger le côté vraiment rock ‘n roll et puis le côté trad. Ce n’est plus du trad que l’on fait puisque ça envoie un petit peu plus.

Certains d’entre vous ont l’apparence qui va avec !

A cause des trucs dans le nez !!!!!

On sent que vous aimez le rock ?

Voilà, c’est ça, Le gros rock qui tache ! On aime aussi le côté un petit peu trad qui se cache derrière, cette petite musique du son de fest-noz associé au rock pour donner ce mélange.

Il n’y a personne parmi vous qui est breton ou qui a vécu en Bretagne ?

Non, juste un gros bout de galette dans le cœur, du kouign amann bien gras qui huile tout le long du corps.

Vous écrivez et composez vous-même ?

Le rock celtique, c’est la fête, c’est les copains. On aime aussi critiquer un petit peu le système. On est un petit peu révolutionnaire. Voilà, c’est révolution, bière, copains, amour… la vie !

Que représente le Festival Interceltique pour vous ? Vous êtes au cœur d’une grosse machine, ce n’est pas n’importe quelle tournée.

C’est l’objectif, le Graal, la coupe de la vie ! C’était important, on en parlait depuis longtemps. Cette année, quand j’ai eu ma première touche pour venir jouer ici, je me suis dit qu’on allait peut-être pouvoir faire une tournée. Étant donné qu’on vient de loin, on ne peut pas se permettre de venir faire une date. L’objectif était de trouver ensuite des dates aux alentours.

Vous avez tous pris des congés. Vous travaillez à côté. Ce n’est pas votre activité principale.

C’est la passion de la musique. C’est une bande de copains, ça c’est important. Il y a l’osmose du groupe. Même si on n’en vit pas, on a vécu une belle expérience.

CD : Tournée générale !

Page : https://www.facebook.com/KCRcelticroll/

Article et entretiens réalisés par Didier Le Goff
au Festival Interceltique de Lorient 2017

Entretien KORRIGAN’S CELTIC ROCK réalisé par Laura HEULARD,
journaliste à J’aime Radio (http://www.jaimeradio.fr/).

Lire aussi l’entretien avec Jean-Michel Leignel, programmateur de la Salle Carnot : www.rythmes-croises.org/festival-interceltique-lorient-2017-salle-carnot-entretien-avec-jean-michel-leignel

Site du Festival : http://www.festival-interceltique.bzh/

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