KING CRIMSON – Heavy ConstruKction

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KING CRIMSON – Heavy ConstruKction
(DGM / Panegyric)

Comme si KING CRIMSON ne nous avait pas assez étouffé de parutions de CD en l’an 2000, le voilà qui récidive la même année avec rien moins qu’un coffret de 3 CD live reflétant les meilleurs moments de sa tournée européenne de mai et juin 2000 (le concert de Paris y est notamment représenté). Hormis trois ou quatre improvisations somptueuses, les deux premiers CD de Heavy ConstruKction exposent le répertoire classique choisi par KING CRIMSON pour cette tournée. On y retrouve l’intégralité de l’album The ConstruKction of Light (excepté le bonus de PROJEKCT X), en général dans des versions proches des originales, mais nettement transcendées.

Quoi qu’on ait pensé de la précédente production studio du Roi cramoisi, il faut bien reconnaître que les interprétations live apportent un « plus » indéniable. Lark’s Tongues in Aspic Part. IV s’avère moins poussif et plus dynamique, sa « coda » (I Have a Dream) gagne en cohésion en étant écourté, FraKctured est époustouflant de technicité, et même Oyster Soup est plus digeste ! Les autres temps forts sont les revisites des pièces de l’album THRAK, la version acoustique de Three of a Perfect Pair et la reprise du Heroes de David BOWIE, dont FRIPP avait assuré la partie de guitare avec ce son si caractéristique.

Mais naturellement, ce qui convaincra les plus réfractaires aux compositions actuelles du Roi de se procurer ce Heavy ConstruKction, ce sont les improvisations. On ne s’étonnera pas que celles-ci empruntent aux idées (de riffs, de trames rythmiques, de climats…) formulées par les ProjeKcts. Munchen est ainsi une variante du « semblant-zeuhl » Seizure de PROJEKCT 4 sur lequel se greffe le riff assassin du Masque.9 de PROJEKCT 3 qui a été utilisé pour Into The Frying Pan. De même, Bonn et Offenbach démarrent sur la coda ambiant de Heaven & Earth (PROJEKCT X) pour après évoluer différemment chacune.

Enfin, quel bonheur de retrouver The Deception of the Trush, joué ici par la formule PROJEKCT 3 ! Cette pièce (qui emprunte ses mots au poète T.S. ELIOT) compte parmi les plus belles créées par « CRIMSO » ces derniers temps (à quand une version définitive en studio ?) et les deux versions incluses dans Heavy ConstruKction révèlent ses éblouissantes facultés mutantes. KING CRIMSON n’a donc pas négligé la frange de son public plus réceptive à ses explorations en terrain mouvant puisque le troisième CD est un assemblage/montage de différentes impros conçu par Pat MASTELOTTO et Bill MUNYON (un technicien) un peu à la manière du disque de PROJEKCT 3.

KING CRIMSON s’offre là sous ses meilleurs jours, et nul doute que certains se réconcilieront sans peine avec lui à l’écoute de ce volet de Heavy ConstruKction. Dans ce qui est présenté comme « une suite cohérente tirée d’une série d’événements incohérents », Sa Seigneurie antédiluvienne, propulsée par son alter ego PROJEKCT X, livre un heavy-free-rock aux accents electronica (les V-Drums de MASTELOTTO) dans lequel les guitares se transforment en maîtres illusionnistes de l’anamorphose sonique, crachent de la lave saignante ou ébauchent des lignes d’horizons nébuleuses constamment fuyantes.

Dire que l’on est en territoire strictement inédit serait un peu exagéré puisque, comme on l’a dit, les impros de ce coffret sont, à des degrés divers, des variantes des « paysages » explorés par les précédents ProjeKcts. Cela tend à corroborer l’idée qu’elles émanent de « works in progress » et qu’elles en sont elles-mêmes pour KING CRIMSON.

Cela dit, MASTELOTTO et MUNYON ont apparemment tenu à les présenter comme des pièces abouties puisqu’ils ont dans la plupart des cas eu recours à différentes prises pour concevoir les « versions » qui sont présentées ici (cccSeizurecc est par exemple un montage de six enregistrements !).

En tout cas, on ne pourra pas dire que Heavy ConstruKction ne dresse pas un panorama complet de la tournée européenne 2000 de KING CRIMSON : on y a même reproduit les incidents techniques dus à d’inavouables prises de photos au flash (sacrilège suprême à la Cour du Roi cramoisi, comme on sait) ! Essayez donc de trouver un « bootleg » qui en propose autant !

Stéphane Fougère

(Chronique originale publiée dans
TRAVERSES n°8 – mars 2001)

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