TRISOMIE 21 – Elegance Never Dies

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TRISOMIE 21 – Elegance Never Dies
(Chromo Music Production / L’Autre Distribution)

TRISOMIE 21 est un acte créatif dans toute sa splendeur. Originaire de Denain (dans la banlieue de Valenciennes), petite ville ouvrière et minière du Nord de la France, avec ses « usines sidérurgiques qui tournent sans interruption et où la nuit est rouge », les frères LOMPREZ, Philippe et Hervé, ont le désir de faire de la musique, leur propre musique… Depuis qu’ils sont gamins, ils n’arrêtent pas de jouer de la musique, dès qu’ils le peuvent !!!

TRISOMIE 21 est un acte radical et punk quant au choix du nom, pas facile à porter avec ses désavantages évidents, mais qui s’avère pourtant la plus belle façon de s’identifier à ces êtres sensibles et à la forte personnalité. C’est aussi un bon moyen de se démarquer, d’appartenir à cette marge qui souhaite autre chose que ce que la télé nous sert quotidiennement.

TRISOMIE 21 appartient à la légende, rare formation française à égaler les groupes anglais et européens de la scène post-punk et cold wave. Depuis plusieurs décennies déjà, ils ont façonné une discographie jalonnée de disques somptueux, baignés d’une atmosphère émotionnelle intense et d’un esthétisme rare.

TRISOMIE 21 est une œuvre d’art pure : une voix particulière, touchante, fragile parfois fausse de Philippe (« quelqu’un qui chante faux exprime un truc juste »), des musiques pleines de poésie, de romantisme noir, de mélancolie orchestrée de main de maître par Hervé.

L’actualité du groupe a été marquée ces derniers temps par plusieurs choses .Il y a eu les rééditions vinyles de leurs premiers disques (période 1983-1987) : Le Repos des enfants heureux (avec cette image de la pochette provenant du magazine communiste France/URSS), Passions Divisées, Wait & Dance, et Chapter IV- Le je-ne-sais-quoi et le presque rien (réunissant sous la forme d’un double LP, la version originale longtemps indisponible et la version remixée qui existait déjà en CD).

Et après un retour en studio en 2017, il y a surtout la sortie d’un nouveau disque au titre plutôt bien trouvé : Elegance Never Dies. Oui, TRISOMIE 21 est auréolé de cette élégance qui continue de briller grâce à ses deux têtes-pensantes, aussi intègres que sympathiques pour les avoir rencontrés plusieurs fois au cours de ces vingt cinq dernières années : la première fois, c’était dans une FNAC à Paris pour la parution du disque Distant Voices où Blaine L. REININGER de TUXEDOMOON fait quelques apparitions ; et il y eut cette autre fois chez nos amis de Souffle Continu, suite à la sortie de Black Label.

La poésie sonore de T.21 est toujours aussi d’actualité et avec ce disque, elle trouve encore une place dorée parmi le contexte musical actuel plutôt morne voire insipide. La musique a été capable au fil des années d’évoluer dans le bon sens ; elle trouve encore de belles choses à exprimer et continue de distiller un peu de sa beauté dans ce monde en perdition… Une beauté empoisonnée étourdissant nos âmes ; et cela depuis bien longtemps, que ce soit avec des chansons intemporelles comme Il se noie ou Waiting For dans les années 1980 ou encore aujourd’hui avec Alice et ce son de basse qui vous retourne les tripes.

Elegance Never Dies est une belle surprise permettant ni plus ni moins une nouvelle plongée dans leur univers particulier, suite logique de Happy Mystery Child et Black Label, leurs précédents travaux sortis respectivement en 2004 et en 2009 ! Comme toujours, les textes sont de Philippe alors qu’Hervé compose toutes les musiques et joue de tous les instruments. Toutefois, quelques musiciens invités sont venus prêter main-forte sur certains titres : Pascal TISON qui joue de la « tube guitar » sur Where Men Sit et de la basse sur Over the Noisy Keys, Randy H à la « pedal steel guitar » sur Our Trip et Martin BLOHORN qui livre quelques sons électroniques sur Something Else.

Les compositions sont cohérentes, solides, alliages parfaits de sonorités cold, rock, électroniques, synthétiques et atmosphériques. T.21 joue du T.21 et c’est finalement ce que nous désirons le plus.

Le titre d’ouverture, Where Men Sit, fait déjà partie de ces classiques dès la première écoute. La voix est intacte, accompagnée de belles sonorités électro, des boucles lumineuses, une guitare électrique fiévreuse et une basse majestueuse toute en discrétion. Cette chanson flamboyante révèle un groupe touché par la grâce, avec toujours ce sens inné pour la mélodie, les envolées, la richesse des sons qui se télescopent harmonieusement.

La musique de cet album est une succession d’ambiances électroniques, atmosphériques, cold et très rock que nous découvrons au fil de l’écoute : se dévoilent des chansons simples, efficaces chargées d’émotions (Something Else), des haïkkus remplis de rêverie, de chagrin et d’espoir. T.21 n’oublie pas le côté rock (No Man Can Imagine) et plus agressif de sa musique avec ici et là des sons tranchants de guitare qui vous marquent au fer rouge (Over the Noisy Keys).

Is Anybody Home ? (Part 5)  est une envoûtante chanson électro dark et  orchestrale, dévoilant des arrangements d’une grande finesse. IAH ? est une suite musicale qui a débuté dès Passions Divisées en 1984 et qui jalonne la carrière de T.21 à l’image d’un Larks’ Tongues in Aspic de KING CRIMSON.

Le onzième et dernier titre est justement une version instrumentale de Is Anybody Home ? (Part 5)… Manière de rappeler à quel point Hervé fait de merveilleuses choses avec ses synthés. Les nouveaux venus peuvent avoir un autre aperçu tout aussi convaincant avec During all these Years, autre pièce instrumentale avec ces quelques notes de piano des plus nostalgiques.

Rebirth fait étrangement penser à du CURE et sur Tender Now, il y a au tout début ces boucles électroniques entêtantes qui rappellent un peu TANGERINE DREAM avant de poursuivre sur un rythme électro plus classique dansant et très kraftwerkien.

Et il y a cette chanson, Alice, comme si le temps s’était arrêté, comme si TRISOMIE 21, d’un simple coup de baguette magique, remontait le temps pour revenir trente ans plus tôt. Alice est un hymne où la basse va vous faire chavirer au pays de la mélancolie gothique et où cette voix surgit du fond de la nuit pour vous raconter une histoire.

Peut-être que certains ont une préférence pour les premiers albums, mais ce nouveau petit bijou contient l’ADN de TRISOMIE 21 et entre dans la continuité de ce que Philippe et Hervé ont fait depuis tant d’années. Elegance Never Dies offre de très belles ambiances, rythmées, prenantes mais aussi parfois contemplatives. L’élégance de TRISOMIE 21 demeure immortelle.

Cédrick Pesqué

Site : http://www.trisomie21.tv/

 

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