THE KLEZMATICS – Rise Up ! Shteyt Oyf !

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THE KLEZMATICS – Rise Up ! Shteyt Oyf !
(Piranha Records)

Groupe phare new-yorkais du revival klezmer de la fin des années 1980, THE KLEZMATICS semble avoir freiné ses enregistrements discographiques depuis l’album The Well, avec la chanteuse Chava ALBERSTEIN (1998). Il est vrai que le saxophoniste Frank LONDON et que le chanteur et multi-instrumentiste Lorin SKLAMBERG se sont investis durant ce temps dans maints projets (KLEZMER BRASS ALLSTARS pour le premier, NIGUN et ZMIROS pour les deux). De plus, la violoniste Alicia SVIGALS a quitté le groupe et  a été remplacée par Lisa GUTKIN (du groupe celto-fusion WHIRLIGIG), qui se débrouille très bien. Pas de repos pour les braves donc, aussi THE KLEZMATICS ont-ils intitulé leur sixième album Rise up ! Shteyt Oyf !, comme une injonction impérative : « Levez-vous ! Soulevez-vous ! » Tout un programme à double fond hautement roboratif !

Autant le dire de suite, si les KLEZMATICS ont assumé le flambeau du la deuxième vague klezmer ils ne souhaitent apparemment pas sauter à pieds joints dans une éventuelle troisième vague qui pourrait être davantage incarnée par les projets électro de David KRAKAUER ou celui de SOLOMON et SOCALLED. Non, les KLEZMATICS se contentent d’assurer les arrières de leur légende, jouant ce qu’ils savent faire, ce qui, malgré tout, est déjà beaucoup.

Car le « style » du sextet (augmenté ça et là de plusieurs musiciens et choristes invités) garantit cependant une délectation de haut vol, à défaut de créer des surprises. Cet audacieux mélange de mélodies héritées des cérémonies de mariages dans les « shtetlekh », de chants sans paroles d’influence hassidique (les fameux « nigunim »), d’éléments de jazz avant-gardiste ou emprunté à d’autres cultures livre une fois encore de belles perles.

Dans le registre enjoué et frénétique, on se régalera avec Kats un Moyz, Makht Oyf ou bien Tepel, lequel provient du répertoire de mariage du clarinettiste Rudy TEPEL et voit le groupe accompagné par une chorale enfantine au timbre vivace.

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La mélancolie langoureuse est également bien présente, par exemple à travers l’émouvant Di Gayster, composé par le clarinettiste du groupe, Matt DARRIAU, ou encore Yo Riboyn Olam, teinté qawwali de par la présence d’un harmonium, sans parler du chant toujours prenant de Lorin SKLAMBERG.

Enfin, les KLEZMATICS n’ont rien perdu de leur activisme contestataire. On en jugera avec ces deux reprises de I Ain’t Afraid, dont une interprétée en anglais et en yiddish, sur fond de touches gospel. Il s’agit d’un morceau emprunté à Holly NEAR (chanteuse, actrice et professeur américaine réputée comme « ambassadrice de la paix »), qui aborde le douloureux problème du fanatisme religieux. Un couplet parmi d’autres : « I ain’t afraid of your churches, I ain’t afraid of your temples, I ain’t afraid of your praying, I’m afraid of what you do in the name of your God. » Ce morceau a été beaucoup joué en concert par les KLEZMATICS depuis un certain 11 septembre…

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Écrit pour de jeunes travailleurs du ghetto de Vilna dans les années 1920 par le poète Shmerke KACZERGINSKY (dont la voix est samplée), Barikadn reflète le combat du groupe contre la globalisation et pour la défense des droits des travailleurs. Quant à la chanson Loshn-Koydesh, amoureusement interprétée par SKLAMBERG, elle relate la relation plus que scolaire entre un professeur et son élève, de même sexe que lui bien sûr…

Qu’on se rassure donc, les KLEZMATICS sont loin d’avoir l’inspiration en berne ; ils surprennent moins, mais ils assurent toujours plus. Cela mérite bien qu’on se « lève (« Rise Up ! ») pour eux une fois de plus, non ?

Stéphane Fougère

Site : www.klezmatics.com

Page label : www.piranha.de

(Chronique originale publiée dans
ETHNOTEMPOS n°13 – septembre 2003)

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