DDAA (DÉFICIT DES ANNÉES ANTÉRIEURES) – Action et Démonstration japonaise n°4 et n°5

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DDAA (DÉFICIT DES ANNÉES ANTÉRIEURES) – Action et Démonstration japonaise n°4 et n°5
(Fractal Records)

C’était en 1982 ; cinq ans après sa création, le groupe bas-normand DÉFICIT DES ANNÉES ANTÉRIEURES, alias DDAA, jusqu’ici auteur de EP et de cassettes comme toute bonne formation hexagonale œuvrant dans la nouvelle vague marginale, sortait enfin son premier disque Long Play : Action & Japanese Demonstration, qui exposait la vision qu’avait le groupe de la « nébuleuse japonaise ». Cet album a été réédité en support CD par Fractal Records en 2008. (Lire notre chronique pour vous rafraîchir la mémoire.) En 2020, c’est le même valeureux label Fractal Records qui publie ce qui se présente comme la suite de l’album pré-cité, Action et Démonstration japonaise n°4 et n°5. Le lecteur un tant soi peu réveillé aura sans nul doute remarqué ce qui semble être une anomalie mathématique et ne manquera pas alors de demander : « Mais où sont passés les n°2 et n°3 ? » Très bonne question, passons à la suivante… Non, en fait, il faut savoir qu’Action et Démonstration japonaise forme chez DDAA un cycle de travail constitué de plusieurs phases, elles-mêmes illustrées par des performances live et des enregistrements de studio.

Action et Démonstration japonaise a ainsi été entamé en 1979 avec un concert à Hérouville St-Clair – qui représente donc l’Action et Démonstration japonaise n°1 –, suivi d’un autre en 1980 à la Biennale de Paris (dans le cadre de la « Cérémonie du thé », comme il se doit !), qui a fait office d’Action et démonstration japonaise n°2, et a été poursuivi avec la publication deux ans après du LP Action & Japanese Demonstration, qui représente donc en fait la phase n°3 !

La même année est sortie une cassette dont le contenu était complètement différent du disque vinyle et qui constitue donc la phase n°4. C’est elle que l’on retrouve rééditée sur ce CD, augmenté d’une pièce, Shibukawa, conçue en 2016 pour le projet Acoustic Camera, dans lequel une caméra a été pointée 24h/24h sur une rue typique du Japon pour donner à voir une réalité simple tout en écoutant une projection occidentale du Japon !

Cet enregistrement récent (donc tardif) a mis un terme au cycle Action et Démonstration japonaise, dont il constitue logiquement la phase n°5. Sauf qu’il a été présenté alors comme le n°4. Bref… Il ne faut surtout pas s’inquiéter de ces anomalies numériques, qu’il faut assurément mettre sur le compte du décalage horaire entre la France et le Japon !

Les huit pièces de la cassette Action Et Démonstration Japonaise N°4 forment un excellent complément au LP de 1982 et s’inscrivent on s’en doute dans la même veine exploratoire d’une certaine vision occidentale de la réalité culturelle japonaise.

Avec une instrumentation en grande partie moderne et urbaine (guitares, basse, synthétiseurs, piano, percussions et voix), le trio DDAA recrée à sa façon un univers sonore japonisant : les guitares sont accordées (ou désaccordées) pour sonner comme des instruments traditionnels nippons type shamisen ou biwa, les inflexions vocales font écho à celles qui émanent des acteurs du théâtre nô ou kabuki, des percussions diverses et variées, frappent, cognent, galopent, tintent et résonnent, et des nappes et effets synthétiques étalées ici et là achèvent de conférer à l’ensemble un parfum de cérémonie rituelle fantasmatique de première volée, avec ce qu’il faut de dissonances stimulantes, d’outrances inquiétantes et de martialité tonitruante pour nous assener le fameux « coup de baton » pratiqué dans l’enseignement du zen.

Mais de musique méditative il n’est point question ici. Sa singularité expérimentale intrinsèque, confortée par une prise de son « brute de fonte » (mais très claire), titille tous les sens de l’auditeur. Il y a dans Action et démonstration japonaise autant à écouter qu’à voir et à sentir. DDAA parle à ce sujet d’« antimusique olfactive » (sic)…

Toujours est-il que le fan de DDAA ne pourra que se satisfaire de l’existence de ce CD, qui complète et clôt la « saga » Action et Démonstration japonaise en fournissant les pièces enregistrées manquantes en support numérique jusqu’à aujourd’hui. On suppose que les concerts-performances qui formaient les phases n°1 et n°2 n’ont pas été enregistrés ni filmés, à moins que…euh… si vous y étiez à l’époque, vous ne voulez vraiment pas fouiller dans votre cave ou dans vos armoires ? Il y a peut-être une bande qui traîne, non ?

Stéphane Fougère

PS : Cet album est paru chez Fractal Records dans le cadre de son faramineux projet A Day in a Life, In Search of Yin & Yang – The Cycle of Night And Day: The Eternal 24 Hours. Chacune de ces 24 heures est représentée par un album d’un artiste ou d’un groupe, ce qui fait que la collection complète s’élève à 24 CD + 2 autres CDs de « matériel supplémentaire », regroupés en deux séries complémentaires comprenant chacune 12 volumes, la première, “Constructive 21°Siècle”, nocturne et tendance « Yin », et la seconde, “Prospective Marge”, qui représente la face « jour » et la tendance « Yang ». Dans cette dernière se trouvent cinq autres rééditions d’anciens enregistrements de DÉFICIT DES ANNÉES ANTÉRIEURES : Live in Acapulco (2 CD), Prehistoric Rejet, La Famille des saltimbanques et En concert. L’album qui fait l’objet de la présente chronique représente quant à lui le matériel supplémentaire de la tendance « Yang ». On peut se procurer la collection complète, ou bien des moitiés, ou bien chaque volume à l’unité.

Pour en savoir plus :

www.fractal-records.com/01fractal/fractal.htm

 

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